Voilà… Les prix du festival international d’Angoulême ont été remis. Petits éditeurs et bd alternative à l’honneur. Un palmarès très très très attendu !
Le grand prix, tout le monde le savait largement avant qu’il soit officialisé, a été remis à Rumiko Takahashi, une mangaka. Pour couronner une femme, après les polémiques des années passées ?… Peut-être bien. Mais je dirais, pour suivre l’idée d’une auteure française, que donner un prix à une femme parce que c’est une femme, c’est déjà du sexisme !
Et le manga à la manière de Takahashi, c’est, pour moi, bien plus de l’industrie que du neuvième art. Et une industrie particulièrement mièvre le plus souvent !
Pour le reste des prix, en voici la liste… Le Fauve d’or a été remis au livre « Moi, ce que j’aime, c’est les monstres ». Un album-fleuve encensé dès sa sortie par nombre de critiques, dont le titre s’éclaire d’une horrible faute d’orthographe, et dont le contenu, je l’avoue, m’a paru diablement lourd !… Mais, c’est vrai, extrêmement fouillé au niveau du dessin, et, de ce fait, intéressant. Mais, je le répète, indigeste pour tout un chacun…
Le prix spécial du jury a été octroyé à un livre de chez Actes Sud, « Les rigoles », un objet graphique très « branché ».
Fauve-révélation : Ted, drôle de coco. Fauve-série : Dansker. Prix alternative : Expérimentation.
A mon humble avis, tout cela ne va présenter, pour le public, qu’un intérêt particulièrement ténu !
Mais, heureusement, il y a eu le fauve-patrimoine. Et c’est un immense artiste qui l’a obtenu, pour un livre paru… au milieu du dix-neuvième siècle !!! Gustave Doré mis à l’honneur à Angoulème, c’est une surprise, une bonne surprise, une excellente surprise !
Les autres fauves ont été attribués à des livres plus connus, voire même reconnus…
Le fauve-polar a été remis à « VilleVermine », polar sauvage, le fauve-jeunesse au livre intelligent « Le prince et la couturière ».
Et puis, il y a le prix remis à « Il faut flinguer Ramirez », une bd à la Tarentino qui me paraît manquer de consistance et de fil narratif, mais qui, de par sa construction totalement décalée, a plu à pas mal de monde, lecteurs comme critiques. Un choix, donc, qui se défend pour ce fauve-lycéens.
Un autre prix qui se défend aussi, c’est le prix Goscinny, le seul prix d’Angoulême qui mette à l’honneur un scénariste. Une récompense qui a été décernée à Pierre Christin, pour l’ensemble de son œuvre, et, en particulier, pour l’album « Est-ouest » paru chez Dupuis. Un livre que j’ai eu le plaisir, de chroniquer… http://bd-chroniques.be/?s=est-ouest
Il y a donc, comme dans tous les palmarès, du mauvais, du moins mauvais et même du bon dans cette remise de prix d’Angoulême.
Mais il me semble quand même, et je sais ne pas être le seul à avoir une telle analyse, que les éditeurs « classiques » et leurs livres résolument tous-publics sont les grands absents de ces prix… Cette année peut-être encore plus que précédemment, d’ailleurs !
Bien sûr, vous me rétorquerez que rien n’est plus « tous-publics » que l’œuvre de Rumiko Takahashi, vendue à des millions et des millions d’exemplaires ! C’est vrai… Mais souvenons-nous, quand même, que cela ne s’est pas fait grâce à la bande dessinée, mais à de « l’animation télévisée » qui manquait terriblement de qualité !
Angoulême se veut international, c’est bien… Mais je connais des mangas qui, à la fois, se vendent bien et ont une construction graphique et narrative qui ne se contente pas de recopier à l’infini les mêmes codes !
Vous l’aurez compris, pour moi, ce grand prix n’a strictement aucun intérêt artistique… Mais ce n’est que mon avis, et je ne cherche pas, au contraire des « octroyeurs de prix », à l’imposer… Mais simplement à pouvoir l’exprimer ! Librement…
Et une question me tarabuste… Ceux qui délibèrent et donnent des prix ne souhaitent-ils pas, d’abord, agir uniquement selon leur propre goût, un goût qui, surtout dans la bd dite alternative, est aussi dicté par la copinerie, voire le besoin de se poser en « intellectuel » de la bande dessinée ?…
Finalement, dans ces prix, n’est-ce pas le public qui se voit floué de ses goûts et de ses passions ?…
Jacques Schraûwen