Jésus Aux Enfers – Trois jours de la vie du Christ dont les Evangiles « officiels » ne disent rien !

Jésus Aux Enfers – Trois jours de la vie du Christ dont les Evangiles « officiels » ne disent rien !

Un livre étonnant, un livre original, un livre à découvrir !

copyright soleil

En une époque où il est souvent de très bon ton de se moquer de la religion, des religions même, voire de les fustiger, on ne peut que s’étonner de voir apparaître un livre comme celui-ci ! On pourrait aussi croire, alors, que l’auteur d’un tel ouvrage fait là œuvre de croyant. Mais il n’en est rien… Thierry Robin, l’auteur de cet album, s’est bien plus intéressé à ce que sont les évangiles… A la façon qu’ils ont eue d’aider à la propagation d’une religion.

Thierry Robin

Thierry Robin, ainsi, a décidé de s’inspirer des évangiles que l’on connaît, du Credo également, cette prière catholique qui dit : « Jésus est mort, a été enseveli, est descendu aux enfers, le troisième jour est ressuscité des morts ».

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Et d’un évangile, celui de Nicodème, un évangile qui était présent dans l’Eglise jusqu’aux années 300, et qui parle justement de ces trois jours aux enfers…

Thierry Robin

C’est à partir de ce texte que Thierry Robin a décidé de parler de ces trois journées, en une bande dessinée qui s’enfouit résolument dans une forme de fantastique… Une vraie gageure…

Thierry Robin

Et c’est par ce biais du fantastique, incontestablement, que Thierry Robin crée une œuvre originale, qu’il transforme une histoire qui a donné vie à la religion catholique et qu’il en fait quelque chose de résolument humain… Le fantastique, en littérature, peut prendre bien des formes… Celle que choisit Thierry Robin est dans la continuité graphique de quelques anciens, comme Druillet… Dans la continuité littéraire de quelques textes du dix-neuvième siècle, également. Il s’agit bien d’une touche personnelle, sans aucun doute possible, d’un regard non formaté, aussi, sur l’histoire de cet évangile de Nicodème.

Thierry Robin

Thierry Robin a totalement réussi son pari de nous offrir un livre passionnant, tous publics, non engagé, ni religieusement, ni philosophiquement. Certes, cet album s’inscrit dans ce que notre culture a de judéo-chrétien comme on dit… Il n’a rien d’une œuvre « catho », mais, en même temps, il n’a rien d’agressif, rien de provocateur vis-à-vis de la religion chrétienne… Et il y a une vraie touche personnelle, dans la rencontre avec Satan par exemple, empreinte d’humour, de jeux de mots, même.

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Et on ne peut que savourer les dialogues de Jésus avec les âmes qu’il vient libérer, avec David, avec Noé, traumatisé d’avoir dû sauver des animaux et laisser mourir des humains, avec le couple Adam et Eve, tout cela est passionnant, souriant, intelligent aussi, et agrémenté de bien des notes venant des évangiles…

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Le dessin et ses couleurs font de cet album un ouvrage qui peut parfois faire penser à la bd sud-américaine, par son travail soigné des aplats noirs, font surtout de ce livre une œuvre originale, avec un superbe sens de la mise en scène. Avec, également, des références cinématographiques, à Cocteau ou à Bergmann, par exemple. Un livre étonnant, donc, et qui mérite le détour !

Thierry Robin

C’est un livre étonnant, oui ! Et à quoi servirait l’art, dites-moi, le neuvième en l’occurrence, s’il n’était pas capable de nous surprendre ! Et, ce faisant, de nous faire réfléchir à cette société dans laquelle nous vivons et dans laquelle, finalement, le « fantastique » occupe une vraie place souvent prépondérante ! Bien plus « humaine » que la sacro-sainte raison qui occupe, de nos jours, le haut du pavé !

Jacques et Josiane Schraûwen

Jésus Aux Enfers (auteur : Thierry Robin – éditeur : Soleil/Quadrants – avril 2025 – 120 pages)

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Jeremiah – 41. Casino Céleste

Jeremiah – 41. Casino Céleste

Non, la bande dessinée ne vit pas que dans les salons de Paris, d’Angoulème ou de Bruxelles! Et c’est à Ath, tout simplement, que j’ai le plaisir de croiser la route, et les dessins, d’Hermann…

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Hermann appartient totalement, et le nier serait mensonger, à l’histoire du neuvième art. Son évolution graphique, son évolution au niveau de l’écriture, son caractère bien trempé, son mépris pour les modes imbéciles font de son œuvre, tout simplement, un chemin de liberté que très peu d’autres auteurs ont réussi à tracer !

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Les « pisse-vinaigre », les bien-pensants « pisse-copies » ont pris l’habitude, depuis quelque temps, de dénigrer Hermann… Plus que de la jalousie, il s’agit de la preuve évidente que la triste connerie humaine devient de plus en plus une réalité…

On peut ne pas aimer tel ou tel album… On peut trouver, pourquoi pas, que le trait a changé, que la construction devient chaotique. Mais ces « posts », ces articles aussi qui se permettent de ne dire que du mal me font penser vraiment à une sorte de guerre ouverte de la part d’imbéciles parvenus vis-à-vis d’un talent qu’ils n’auront jamais !

copyright dupuis

Voilà qui est dit, n’en déplaise aux décérébrés qui se pensent experts et qui ne sont même pas amateurs !

Et donc, je peux reconnaître que ce 41ème opus de la saga « Jeremiah » est déconcertant à bien des niveaux… Mais le plaisir d’être déconcerté et de découvrir un album de ce que je pourrais appeler de la « bd-rythme », permet de dépasser cette première sensation. Hermann est un artiste qui a toujours évité, le plus possible, les habitudes et leurs routines, leurs tics. Et, oui, j’ai été déconcerté par ce « Casino céleste », et j’ai surtout été séduit…

Du côté du scénario, on retrouve Jeremiah et Kurdy, engagés pour une mission dont ils ne semblent pas plus que les lecteurs connaître le sens, perdus dans un lieu de violence, de haine, de pouvoirs, et aussi de révolte contre deux frères psychopathes…

Ce qui me frappe, en fait, dans ce scénario, c’est qu’il semble suivre le rythme du dessin et de la couleur, s’écrire, en quelque sorte, automatiquement, emporté non par l’imagination de son auteur, mais par celle du dessin, de la lumière, de la couleur.

copyright dupuis

« Jeremiah » est une série étrange… On encense, et on a mille fois raison de le faire, l’époustouflant « La Route » de Larcenet… Un album « postapocalyptique » comme l’est toute la saga de « Jeremiah », une série qui se révèle être une véritable fresque « du hasard ». Et d’un côté comme de l’autre, au travers de cette route et de ce casino céleste, ce sont d’identiques points de fuite qui se dessinent… La nécessité d’une révolte, la lutte constante contre l’horreur, la petitesse de tant et tant d’humains… Larcenet déploie un génie graphique sublime pour pénétrer dans cet univers glauque, Hermann se laisse porter par des ambiances crépusculaires, par des couleurs omniprésentes et estompant le réel pour mieux en dessiner les turpitudes et les violences… Il y a chez lui une certaine forme littéraire, visuelle, proche parfois des illuminations d’un Tarentino… Ou du sens des regards que Leone avait…

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Hermann s’amuse à touiller dans toutes les nostalgies qu’il croise… Il aime aussi, de ci de là, agrémenter son livre de quelques références, parfois humoristiques… Par une forme d’amitié entre « confrères », puisqu’on retrouve, dans un personnage terriblement ambigu, l’ami Walthéry. Il a besoin aussi, et Larcenet ne fait pas autre chose d’ailleurs, de garder une forme d’espérance… L’ultime planche de ce « Casino céleste » n’est-elle pas, à ce titre, l’espoir infini que l’Amour puisse rester, finalement, la seule valeur véritablement humaine…

copyright schraûwen

J’ai eu le plaisir de rencontrer Hermann, au sujet de ce livre, et de le laisser parler… J’ai eu le plaisir de retrouver, une fois encore, un homme droit, un homme sans compromissions, un artiste complet… Oui, je l’ai laissé parler, et je vous propose donc de l’écouter, in extenso… Fidèle à ce qu’il a toujours été !… Un ours à moitié léché, comme le disait La Fontaine !…

Hermann

Jacques et Josiane Schraûwen

Jeremiah – 41. Casino Céleste (auteur : Hermann – éditeur : Dupuis – octobre 2024 – 48 pages)

Jeremiah – 40. Celui Qui Manque

Jeremiah – 40. Celui Qui Manque

Quarantième album d’une série phare de la bande dessinée !

copyright hermann

Avant de chroniquer cet album d’Hermann, permettez-moi d’abord un petit coup de gueule !

Ici et là, chez « d’éminents collègues », je vois fleurir depuis quelques mois des avis négatifs sur le dessin d’Hermann. Ici, on parle de proportions ratées, là, de mises en scène bâclées, ailleurs de faiblesse dans le scénario.

En fait, en lisant ces avis « éclairés », on se trouve en face de gens aigris probablement, ou en mal de lecteurs aimant les polémiques, des gens trouvant sans doute le dessin des « Sfar et compagnie » parfaits, des gens qui, finalement, prennent leur pied, avec des mots incertains, à accuser Hermann de vieillir !

Il fut un temps où on disait qu’on ne pouvait pas vivre dans le passé. Aujourd’hui, on cherche à nous obliger à vivre sans passé ! Et donc sans mémoire… Et donc sans jamais mettre le talent en perspective…

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Voilà ! Foin de ces experts intellectuellement impotents et déjà vieux sans jamais avoir été jeunes ! Après cette mise en bouche, en mots plutôt, passons, voulez-vous, à ce Jeremiah numéro 40. Et pour ce faire, commençons justement par parler du « passé ».

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Lorsque cette série a vu le jour, elle était une sorte de récit d’aventures postapocalyptiques, dans un proche futur trouvant ses bases dans une réinvention du western.

Au fil des années, Hermann a gardé son univers déshumanisé, mais en le démesurant. Il a aussi fait de l’amitié entre Jeremiah et Kurdy la seule vraie constante narrative, en laissant l’action, l’aventure pure et dure n’être là que comme environnement. Kurdy et Jeremiah ne sont peut-être, après tout, que la continuation graphique et littéraire d’Hermann lui-même.

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Mais cela fait, évidemment, que cette série, tout compte fait ancrée dans les questionnements et les angoisses des années 80, se soit faite peu à peu très différente.

C’est ainsi que, progressivement, le Hermann classique de Comanche a disparu pour laisser la place à un artiste complet, à un dessinateur, certes, mais aussi à un maître de la peinture et de la lumière. Un artiste, oui, se laissant de plus en plus aller, d’album en album, à une sorte d’inspiration immédiate. On ne peut que remarquer, également, l’importance de plus en plus grande qu’a prise la couleur… Une présence absolument époustouflante dans ce quarantième album, où les réalités se font perdues dans des brouillards de poussière jusqu’aux dernières planches s’acceptant lumineuses…

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Dans cet album, un album dans lequel Jeremiah est « celui qui manque », le lecteur doit se laisser emmener par des ambiances bien plus que par des péripéties. Kurdy se retrouve seul… Et il n’est plus que la moitié de lui-même… Et c’est d’amitié, de solitude, d’absence, donc de mort, que parle ce livre. Amour… Amitié… Oui, et tout y participe ici où, une fois de plus, la couleur occupe une place prépondérante.

C’est à travers elle, et elle seulement peut-être, qu’on peut appréhender cet album.

Et puis, il y a le dessin d’Herman… Sa façon de perdre ses personnages dans des brumes presque palpables… Sa façon de trouver, jusque dans ce que d’aucuns appellent la laideur l’infini de la beauté… Sa manière exceptionnelle de rythmer son récit par l’approche qu’il fait, graphiquement, des regards de ses personnages…

Avec Hermann, on quitte les seuls codes de la bande dessinée pour en accepter d’autres, dans la filiation de peintres comme Schiele incontestablement, Munch peut-être, Grosz certainement…

Dans la série « Jeremiah », Hermann s’est mis progressivement en roue libre. Et c’est ce qui fait que, dans ce quarantième album, il n’a jamais été aussi moderne ! Il y dessine l’amitié et l’absence, comme Brel la chantait…

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Voilà… Suis-je trop admiratif ?

Non… Je me suis contenté, dans cette chronique, de répondre au seul sentiment important dans l’existence, le plaisir !

Plaisir d’aimer un des trois ou quatre dessinateurs essentiels du neuvième art… Plaisir de rendre hommage à un talent exceptionnel, et qui ne faiblit pas, n’en déplaise aux pisse-froid qui, de nos jours, se multiplient et veulent tout régenter, justement, du plaisir que peut et doit donner la lecture !

Jacques et Josiane Schraûwen

Jeremiah – 40. Celui Qui Manque (auteur : Hermann – éditeur : Dupuis – octobre 2023 – 46 pages)