Un humour trash, provocateur et totalement incorrect !
Du haut de ses trente printemps, Laetitia Coryn n’a vraiment pas peur des situations scabreuses ! Cela lui permet de nous exhiber une famille de beaufs à la Reiser ! Même pires…
Une famille, oui… Un père, une mère, et une petite fille… Un oncle, chômeur, aussi, et un ami timidement lubrique… Des voisins arabes, mais intégrés, ou presque. Un microcosme, en fait, qui résume l’horreur du quotidien lorsqu’il ne s’embarrasse ni de morale ni d’intelligence.
En gags qui ne dépassent pas les trois ou quatre pages, Laetitia Coryn nous dévoile, en fait, la triste et immense connerie humaine ! Pour la montrer, la dénoncer, elle a fait le choix de mettre en avant une petite fille pour qui le mot « enfance », ne signifie plus grand-chose, et ses parents dont la morale et les valeurs sont celles du graveleux, de l’innommable, de l’impensable ! Oui, Laetitia Coryn est une héritière directe de Reiser !
Mais ne croyez pas, cependant, à une imitation, ni au niveau du scénario, ni au niveau du dessin. Certes, les histoires qu’elle nous raconte, celles d’adultes racistes, complètement cons, imbibés de certitudes imbéciles, anti-immigrés, anti-gays, anti-tout-ce-qui-n’est-pas-normal, celles aussi d’une gamine qui entend et accepte tous les sous-entendus les plus pédophiles à son sujet, ces histoires ont le même canevas de départ que celles de Reiser. Mais le trait est différent, dans les mots comme dans le graphisme. Laetitia Coryn caricature ses personnages, mais sans insister outre mesure, et elle les plonge dans des décors qui en soulignent à chaque fois le quotidien, un quotidien bancal, un quotidien dans lequel le rire est tonitruant et répugnant…
On rit jaune, on rit noir, avec ce livre. Sans doute parce qu’il parle de pédophilie, de cancer, de mort, de politique, certainement parce qu’il nous montre une société, la nôtre, dans laquelle la bêtise devient un élément de plus en plus moteur de notre société. On rit jaune, on rit noir, mais on rit… parce que, comme le disait Desproges, il est salutaire de pouvoir encore avoir la liberté de rire de tout !
Un bouquin étonnant, à découvrir… parce que l’humour est sans doute l’ultime recours contre la bêtise humaine ! Surtout quand cet humour ne s’encombre d’aucune (auto-)censure !
Jacques Schraûwen
Priscilla (On choisit pas sa famille) (auteure : Laetitia Coryn – éditeur : Glénat/Glénaaarg ! – 64 pages – septembre 2019)