Retrouvez tout le talent d’un des « GRANDS » du neuvième art !
Mitacq est mort en 1994, à l’âge de 66 ans à peine. Il laisse derrière lui une œuvre importante, une présence essentielle et incontestable dans le paysage de ce qu’on appelle l’âge d’or de la bande dessinée ! Et la Galerie Champaka à Bruxelles le remet aujourd’hui, enfin, à l’honneur !
L’Histoire, avec un H majuscule, qu’elle soit celle des guerres, des paix, ou celle des arts, a l’habitude de mettre en évidence des personnalités qui, de ce fait, deviennent emblématiques, et d’en oublier d’autres.
Dans l’univers du neuvième art, la chose est évidente aussi. Hergé est le « pape » de la bd, on l’encense comme on encense Uderzo, parfois à tort et à travers, on se souvient de Franquin, un peu de Jijé, et on oublie ou on laisse dans l’ombre des artistes qui jouèrent un rôle essentiel dans l’évolution, la vraie, de la bande dessinée. Je pense à des novateurs qui, à partir d’un canevas précis et réducteur des petits mickeys pour jeunes bien sages, réussirent à imposer, calmement, des thématiques plus graves, plus adultes, plus ouvertes sur le monde tel qu’il est. Je pense à Craenhals et son extraordinaire Chevalier Ardent, je pense à Godard et son Martin Milan quelque peu « anar »…
Je pense aussi à Mitacq qui sut, avec l’aide de ses scénaristes, faire évoluer ses récits en y abordant des problématiques et des réalités tangibles.
Oui, l’auteur de « La Patrouille Des Castors » mérite assurément d’être honoré, lui qui fut et reste un orfèvre du réalisme en bande dessinée. Lui qui sut parler du scoutisme sans angélisme et en réussissant à le montrer ancré dans un vingtième siècle en continuelle mutation.
S’il est vrai que ses « Castors » sont une série essentielle, avec trente albums parus, il ne faut pas oublier que Mitacq fut aussi le dessinateur de quatre albums de Jacques Le Gall, de plusieurs belles histoires de l‘Oncle Paul, de récits complets, et de trois récits de Stany Derval. Et d’illustrations nombreuses, également, pour le scoutisme, entre autres, avec quelques calendriers de la FSC par exemple…
Mais c’est indubitablement dans sa série phare qu’il s’est le plus et le mieux investi. D’abord parce qu’il y a profité de scénaristes talentueux, Charlier bien évidemment, mais aussi Wasterlain et Stoquart, et lui-même. Ensuite parce qu’il a également profité, dans l’un ou l’autre album, de la collaboration graphique d’un des plus grands dessinateurs belges, René Follet.
Ensuite parce que le monde du scoutisme lui était connu. Jusqu’à suivre la réalité en transformant des éclaireurs en pionniers lorsque ces derniers, à l’instigation de Georges Morel, virent le jour en Belgique.
Mitacq fut scout, et je me souviens avoir vu dans une commune bruxelloise un coin de patrouille de son adolescence encore décoré de ses fresques…
Et même si, de nos jours, il est de mauvais ton d’user du mot « valeurs », le scoutisme a permis à des générations et des générations de jeunes d’en découvrir quelques-unes, de s’en inventer aussi… Des valeurs non dogmatiques, celles des mains tendues, celles de ce terme qu’on galvaude tellement aujourd’hui, « solidarité », celles de la parole donnée, celles de l’humilité, celles de l’engagement au jour le jour.
Un des derniers dessins qu’il réalisa fut un cadeau offert à une unité scoute dite « défavorisée » du bas de Saint-Gilles, à l’occasion de ses 75 ans d’existence. Un cadeau, oui, d’un humanisme et d’une simplicité exemplaires !
Et c’est donc à cette part majeure chez Mitacq et dans son œuvre, celle du scoutisme, celle de « La Patrouille des Castors », que la galerie Champaka ouvre ses cimaises.
Ce sont quelque 80 planches originales que les visiteurs vont pouvoir admirer, de tout près. 80 planches qui proviennent des 20 premiers albums de cette série d’aventures adolescentes.
Et si, dans les premiers albums, on voit très bien l’influence (bénéfique) de Pierre Joubert, c’est un vrai bonheur des yeux que de voir Mitacq affirmer peu à peu sa personnalité, sans pour autant renier cet art du trait que fut celui de Joubert.
Cette exposition nous montre aussi des pièces rares, des essais en couleurs pour des couvertures d’albums.
C’est une exposition, certes… C’est aussi un hommage à un dessinateur humaniste… C’est enfin un voyage dans un univers, celui de l’adolescence, que peu de dessinateurs ont réussi aussi bien à restituer en récits et en images mêlés !
Jacques Schraûwen
Exposition dans la galerie Champaka (27, rue Ernest Allard – B-1000 Bruxelles – Tél : 32 2 514 91 52) jusqu’au 2 octobre 2021)
Mitacq, mon père, n’a jamais été scout. C’était interdit pendant la guerre. Il était au patro clandestin de farciennes, près de Charleroi. Par contre, il a été chef louveteau en tant que Baloo à St Alene, à Bruxelles, après la guerre. Il y a reçu son totem, toucan et le quali, bénévole. Cordialement, Béatrice Tacq
Merci pour ces précieuses informations. J’ai eu l’occasion de voir ses dessins dans un des locaux de Sainte-Alène.