En littérature comme au cinéma, et en bd évidemment, le genre « western » réoccupe régulièrement le haut du pavé… Et cet album-ci le fait avec un vrai mélange de talents !
Ce genre plaît et plaira toujours, incontestablement. Sans doute parce qu’il est capable de conjuguer tous les possibles de la narration : l’Histoire, la romance, l’aventure, la violence, le huis-clos, le drame, la tragédie, l’enquête, la quête, le portrait…
Je parlais d’un western choral, et c’est bien le cas, puisque, aux commandes du scénario, on retrouve un seul auteur, Tiburce Oger… Mais un scénariste bien entouré par quatorze dessinateurs complices, pour quatorze récits courts qui nous emmènent à la rencontre de quatorze hommes de loi, marshals, shérifs, juges…
Et à travers ces quatorze nouvelles dessinées, toutes mettant en scène des personnages réels, des situations historiques avérées, les dessinateurs forment une sorte de fresque racontant, à hauteur de quotidien bien plus que de légende, l’histoire de cet ouest américain qui a fait autant rêver que pleurer. Quatorze dessinateurs, cela fait quatorze styles graphiques différents… Et, par la grâce de quatorze scénarios mis bout à bout, mais unis par un fil conducteur efficace, tout cela forme un ensemble cohérent…
Ce fil conducteur, cet axe scénaristique qui permet le lien entre tous les « chapitres », c’est un cahier découvert, par deux truands, dans les poches d’un écrivain qu’ils viennent d’assassiner. Nous sommes, à ce moment-là, au début du vingtième siècle… Mais ce carnet, lui, se remplit de 14 portraits, et nous conduit ainsi de 1813 à 1924 : un siècle d’hommes de loi dans un pays soumis aux aléas de la haine, du pouvoir, du racisme…
Je répète qu’il ne s’agit nullement de belles légendes héroïques illustrées dans ce livre ! C’est un quotidien violent, sanglant, toujours injuste que Oger nous raconte et que dessinent ses complices… Un monde dans lequel la mort est et reste la seule loi, au nom de codes, de justices sans cesse changeantes, d’aléas de l’Histoire… Et bien des réalités de ce siècle enfui sont encore, de nos jours, d’actualité… La guerre de sécession servant de toile de fond à plusieurs récits de cet album n’est, finalement, pas tellement différente des guerres que nos médias nous montrent de nos jours, avec leurs « bons » et leurs « méchants » !
Il en va de même avec le racisme, et je tiens à souligner un des chapitres de ce livre, dessiné par Dimitri Armand, qui aborde cette thématique avec une vraie pudeur loin de toute idéologie inutile. En fait, tous les dessinateurs présents de ce bouquin se sont adaptés merveilleusement au scénario de TIburce Oger, tout en restant eux-mêmes, et c’est ce qui en fait, également, la qualité!
Et tous méritent qu’on souligne leur travail. Astier dont le style classique et posé est bien choisi… Bertail, avec quelques envolées graphiques somptueuses… Meyer, créateur d’ambiances parfait… Milano, influencé par Giraud… Corentin Rouge, Jex, etc.
Un très bon livre, qui nous montre et nous raconte la part du diable et du mal en chaque individu…
Jacques et Josiane Schraûwen
Law Men Of The West (scénario : Tiburce Oger – dessin : 14 auteurs – éditeur : Grandangle – novembre 2024 – 120 pages)