Les Arbres

Les Arbres

La famille Blaireau Renard présente : Les Arbres – un album jeunesse et une exposition à Bruxelles !

La « famille Blaireau Renard », c’est de la bd jeunesse au succès mérité ! Ne ratez pas leur nouvel album et l’exposition qui l’accompagne, au CBBD jusqu’au 16 juin !

Les arbres © Dargaud

Pour la famille recomposée Blaireau-Renard, une balade en forêt à la recherche de savoureux champignons se transforme en une belle « leçon de choses ».

Mais une leçon ludique, d’abord et avant tout, souriante, poétique.

Une leçon qui ne ressemble en rien aux morales bien pensantes qu’on trouve encore (malheureusement…) dans certaines lectures destinées à l’enfance, à la jeunesse.

Une leçon qui commence, d’ailleurs, par l’existence même de cette famille étrange, une existence qui nous raconte, de livre en livre, l’aventure essentielle des différences qui s’acceptent et s’enrichissent les unes les autres.

La puissance et l’intelligence des livres « animaliers », ces ouvrages qui choisissent la voie de l’anthropomorphisme pour s’approcher de l’âme humaine de manière métaphorique, la force de cette manière de raconter une histoire, c’est de mettre en évidence des sentiments qui, de nos jours, deviennent de plus en plus nécessaires : la tolérance, le regard attentif sur le monde et sur les autres.

Et, avec cette famille Blaireau-Renard, c’est une superbe réussite, le fruit d’une véritable osmose entre les deux auteures.

Brigitte Luciani: l’acceptation de la différence
Brigitte Luciani: travailler à deux
Les arbres © Dargaud

Cela dit, l’essentiel, dans ce livre-ci, c’est la nature, ce sont les arbres. On peut, oui, parler d’une bd didactique, une bande dessinée construite en chapitres, chaque chapitre amenant deux planches descriptives. Mais n’ayez aucune crainte, il n’y a dans cet aspect éducatif aucune tristesse, que du contraire ! Pour les adultes, comme moi, lire ces pages-là, c’est se plonger dans son enfance, dans les souvenirs qu’on a des herbiers qu’on faisait pour l’école ou dans le cadre d’un mouvement de jeunesse. Pour les enfants d’aujourd’hui, ces pages-là montrent la nature, la vie des arbres, leurs réalités, et ouvrent donc les regards de l’enfance au monde qui les entoure et à toutes ses richesses, scientifiques, certes, mais symboliques aussi de sentiments et de réalités proches, souvent, de ce qu’est l’humain, donc l’humanisme !

Brigitte Luciani: l’aspect didactique
Brigitte Luciani: la solidarité
Les arbres © Dargaud

Le texte, vous l’aurez compris, n’a rien de débilitant, que du contraire ! Mais il est fait de mots simples, de phrases courtes, de dialogues ressemblant parfaitement à ce que peuvent être (et sont…) les dialogues entre parents et enfants « humains »…

Le dessin, quant à lui, fait bien plus qu’accompagner le texte ! Il le fait vivre, il lui offre de façon tangible l’émotion nécessaire au partage. Le trait d’Eve Tharlet est infiniment plus proche de Calvo, voire même de Hausman, que des illustrations venues des pays de l’Est, et souvent très stylisées. Elle a, lorsqu’elle dessine les personnages, un vrai sens du mouvement allié à un souci d’exprimer les sensations et les sentiments au travers des physionomies et des regards.

Et, pour son approche des planches didactiques, elle réussit à être extrêmement précise, presque scolaire même, sans pour autant perdre de sa tendresse, de la douceur de son graphisme et de sa couleur.

Eve Tharlet: dessiner les arbres
Eve Tharlet: l’émotion
Les arbres © JJ Procureur

Venues toutes deux de l’illustration, arrivées presque par hasard dans l’univers du neuvième art, Brigitte Luciani et Eve Tharlet se voient aujourd’hui totalement reconnues… Une très jolie exposition est en effet consacrée à ce livre-ci, dans la petite galerie du Centre Belge de la Bande Dessinée (CBBD) à Bruxelles, jusqu’au 16 juin 2019 !

Eve Tharlet: L’exposition
Exposition Les arbres © JJ Procureur

D’accord, c’est un livre pour « enfants »… Mais c’est d’abord et avant tout un livre intelligent, un livre d’éveil… Et, adultes, n’avons-nous pas, nous aussi, de plus en plus besoin d’être réveillés pour redécouvrir, dans le monde qui nous entoure, ce qu’est la beauté, ce qu’est l’émotion ?….

A lire, donc, à lire à voix haute à votre bambin ou a vos petits-enfants… A offrir, de toute façon!

Jacques Schraûwen

La famille Blaireau Renard présente : Les Arbres (dessin : Eve Tharlet – scénario : Brigitte Luciani – éditeur : Dargaud)

Les arbres © Dargaud
Alix Origines – L’enfance d’un Gaulois

Alix Origines – L’enfance d’un Gaulois

Revoici le héros mythique créé par Jacques Martin… Mais il a dix ans… Et le dessin comme le scénario font de cette aventure éditoriale une étonnante et excellente « nouvelle » bande dessinée !

Alix Origines © Casterman

C’est en 1948 qu’est né, dans les pages du magazine Tintin, Alix le Gaulois, héros pur et dur imaginé par Jacques Martin. Un héros qui, au fil des ans, va multiplier ses aventures, va également servir de support dans l’enseignement, celui de l’Histoire, mais celui du latin également, grâce à une traduction faite dans les années 80.

C’est un héros qui, d’ailleurs, continue toujours à vivre des aventures mouvementées sous la plume de plusieurs dessinateurs, « fidèles » au dessin originel.

Mais ici, on se trouve dans une tout autre approche. On retrouve Alix à l’âge de dix ans, en 58 avant Jésus-Christ. Il est le fils d’un chef de clan, Astorix, un chef qui, pour défendre les Gaulois de l’invasion des Helvètes poursuivis par Jules César, voudrait demander la protection des Romains. Ce qui ne plaît pas, loin s’en faut, à d’autres clans ! C’est donc dans une ambiance de presque guerre et de lutte de pouvoir(s) que le jeune Alix va entamer une éducation d’adulte.

Et ce gamin adorant ruer dans les brancards va ainsi être obligé de mûrir, très vite, et de découvrir que le monde n’est pas fait d’un seul bloc, de découvrir qu’au-delà des apparences, il y a des ailleurs, ceux du rêve, du fantastique et de l’onirisme, aussi importants que la seule réalité.

Voilà pourquoi, comme dans bien des Alix traditionnels d’ailleurs, le loup occupe ici aussi une place axiale…


Alix Origines © Casterman
Marc Bourgne: le scénario

Laurent Libessart : le fantastique

A mon avis, il n’y a dans cette neuve série, n’en déplaise aux puristes intransigeants, aucune trahison de l’œuvre de Jacques Martin.

Il y a déjà la série Alix Senator, qui nous montre un Alix vieillissant et père de famille, avec un dessin très actuel, très léché. Evidemment, dans cet enfouissement au plus profond de l’enfance d’Alix, le but est de renouveler le lectorat. Mais la démarche n’en demeure pas moins plus qu’intéressante ! Elle est, au vu des dernières découvertes archéologiques, de tenir compte de la réalité historique de cette époque, de remettre les choses en place, en quelque sorte, et de faire œuvre didactique, en nous montrant la façon dont les jeunes Gaulois étaient éduqués, la façon dont les tribus de la Gaule étaient habillées, aussi, et ce qu’était leur quotidien. Il y a eu, oui, un vrai travail de fidélité à la grande Histoire !


Alix Origines © Casterman

Marc Bourgne: historien

Cela dit, n’allez surtout pas croire que ce livre est pesant. Son but est de s’adresser à des lecteurs à partir de dix ans, et cet album se lit sans aucune difficulté. La raison en est à trouver, d’abord peut-être, dans le dessin, un graphisme qui s’éloigne énormément de celui de Jacques Martin, un graphisme qui n’a pas peur du mouvement, et qui est influencé, d’évidence, par le manga. Un graphisme séduisant, c’est incontestable. Tout comme l’est la présence de la couleur, qui joue avec le mouvement, avec les ombres, avec le rêve aussi. Une couleur qui, plus que créer des ambiances, permet à cet album d’être vraiment le reflet d’une époque, de ses mythes et de ses réalités.


Alix Origines © Casterman

Laurent Libessart : couleurs

Sans être un fan des reprises, des resucées, en bd comme en littérature ou en cinéma, je vous avoue que ce livre, oui, m’a séduit. Le dessin est moderne, la couleur est particulièrement réussie, le scénario est passionnant et didactique. C’est une vraie réussite, un album extrêmement bien construit, pour un public jeune et moins jeune, et qui se termine par un excellent cahier pédagogique !

Jacques Schraûwen

Alix Origines – L’enfance d’un Gaulois (dessin : Laurent Libessart – scénario : Marc Bourgne – couleurs : Florence Torta – cahier pédagogique : Franck Mathieu- éditeur : Casterman)


Alix Origines © Casterman
Ada & Rosie: mauvais esprit de famille

Ada & Rosie: mauvais esprit de famille

Une observation souriante mais réaliste de la vie de famille… Et tous les parents s’y reconnaîtront! Comme les adolescents, d’ailleurs…

Ada & Rosie © Casterman

79 pages… 79 « gags » qui mettent en scène une famille : la mère, le père, et leurs deux filles. Dont Ada, l’aînée, une adolescente dans toute sa splendeur.

Cela fait deux ans, en fait, que Dorothée de Monfreid publie ses dessins sur le site du journal Libération. Mais force est de reconnaître que l’impact de ses petites histoires est infiniment plus puissant sur papier, aujourd’hui !

Cette auteure connaît le monde de l’enfance, de la jeunesse, puisqu’elle a derrière elle une vraie carrière littéraire.

Mais ici, grâce au dessin, les situations qu’elle nous raconte se font à la fois succinctes et frontales et, de ce fait, nous touchent immédiatement. Elle nous emmène à sa suite dans un quotidien qui est certainement largement inspiré par le sien, et la description amusée et aimante qu’elle nous fait de cette fameuse Ada qui, sans cesse, s’ennuie, est d’une belle justesse de ton !


Ada & Rosie © Casterman

Dorothée de Monfreid: au cœur du quotidien

Dorothée de Monfreid: l’ennui

En fait, ce qui sous-tend chaque séquence de ce livre, c’est une vraie question existentielle : qu’est-ce que « l’esprit de famille » ? Qu’est qui peut caractériser la réussite d’une vie familiale, la réussite des relations enrichissantes entre parents et enfants ?

Cet album, d’ailleurs, n’élude pas tout ce qui fait partie intégrante de la vie d’aujourd’hui. On y parle, certes, des petites obsessions de chaque jour, mais aussi de mode, par exemple… A la sortie de l’école, on énumère, par exemple, toutes ses allergies, pour savoir qui en a le plus… On y parle de terrorisme, donc de peur… On y parle de « bio », aussi, de la possibilité de ne pas manger de viande. De connexion, aussi, par la multiplication des écrans de toutes sortes en face desquels adultes et surtout enfants semblent parfois se déliter… Et à ce titre, cet « Ada & Rosie » nous parle de la nécessité, pour qu’une enfance soit une enfance d’ouverture, de lui offrir des fenêtres culturelles variées. Et qui, elles, n’ont pas à dépendre des modes et de leurs diktats.


Ada & Rosie © Casterman


Dorothée de Monfreid: l’enfance et la culture

L’esprit de famille ?… Un mélange presque contre nature entre complicité et mauvais esprit, mauvaise foi…

C’est ainsi que ce livre passe des larmes au rire, des sourires aux angoisses. Rien n’est fortuit, finalement, dans cette observation amusée mais, tout compte fait, minutieuse que Dorothée de Monfreid partage avec nous de ses vécus… Des vécus qui ressemblent toujours aux nôtres.

L’esprit de famille, c’est peut-être aussi cela, d’ailleurs : la possibilité de regarder, mais avec amour, et de ne jamais oublier, adulte, l’enfant qu’on a été…

Parce que ce livre, même s’il nous laisse à voir, de l’intérieur, ce que sont les existences au jour le jour de tous les membres d’une même famille, n’est jamais mièvre. Et se révèle être un portrait d’enfance et d’adolescence plutôt que d’âge adulte.


Ada & Rosie © Casterman


Dorothée de Monfreid: tous publics, la part d’enfance

Dans la lignée de Sempé et de son « petit Nicolas », en parallèle des aventures de « Dad », par le ton, mais pas du tout par le graphisme ni par la construction, « Ada & Rosie » n’use d’aucun artifice narratif pour raconter le réel. Ce livre use d’humour, d’abord et avant tout, il use d’écriture, aussi… Une écriture qui prend vie au travers d’un dessin extrêmement souple, presque stylisé parfois, avec des à-plats de couleur sans inutiles fioritures, avec un plaisir à nous montrer des physionomies qui sont miroirs des sensations vécues par les différents personnages.

Des personnages dont les  » têtes de cochon  » sont un jeu de narration graphique, certes, mais certainement aussi une manière symbolique de définir les rapports humains de cette famille diablement attachante ! Une famille, oui, de têtes de mule…


Ada & Rosie © Casterman


Dorothée de Monfreid: l’écriture et le dessin

Jacques Schraûwen

Ada & Rosie: mauvais esprit de famille (auteure : Dorothée de Monfreid – éditeur : Casterman)