La Cire Moderne

La Cire Moderne

La cire moderne

La cire moderne – © Casterman

Une road-bd, au dessin épuré, au scénario mêlant habilement portrait d’un trio de jeunes et quête presque mystique… Un livre amusant, intelligent, sans manichéisme mais avec une bonne dose d’humour parfois iconoclaste !…

Ils sont trois… Manu et Sam, sa copine, et Jordan, le frère pas très futé de Sam. Trois à vouloir profiter ensemble d’un héritage que fait Manu : des cierges d’église. Commence ainsi pour eux un périple au pays de la foi chrétienne !

Leur but : revendre ce stock de cierges, hérité d’un oncle curé que Manu connaissait à peine. Les revendre, se faire de l’argent, pour se payer du bon temps, simplement, en vacances.

Seulement, les choses ne vont pas se dérouler de la manière la plus attendue ! Il faut dire que les trois compères sont bien typés. Un joint par-ci, une petite partie de jambes en l’air par-là, de la drague à tout va pour Jordan, et peu d’envie de penser au lendemain.

Et pourtant, la religion va faire irruption dans ce trio, par petites touches qui, utilisant les codes de la comédie pure, va déboucher lentement sur une réflexion personnelle pour Manu, personnelle et intime, personnelle et mystique.

La religion catholique n’est pas un thème très fréquent dans le monde de la bande dessinée. Et quand il est abordé, force est de reconnaître que c’est de manière négative le plus souvent. Ici, la vision que nous donnent Vincent Cuvellier et Max De Radiguès de l’Eglise catholique est fractionnée, multiple. Souriante, toujours, même pour nous montrer des  » marchands du temple  » plus vénaux encore que notre trio. Mais il n’y a pas de faux fuyant dans leur façon de nous faire voyager, avec eux, de paroisse en monastère, de Lourdes en couvent. Et les portraits qu’ils nous montrent, qu’ils soient ceux des trois personnages principaux ou ceux des différents membres de l’Église qu’ils rencontrent, sont, au-delà de la simple caricature, frappés aussi de réalisme…

 la cire moderne la cire moderne – © casterman

Vincent Cuvellier, le scénariste, est croyant. Max De Radiguès ne l’est pas. Le résultat, c’est un album qui ne se prend pas au sérieux et qui, finalement, prône la tolérance. Mais sans être pour autant un pensum, heureusement ! Le scénario est linéaire, simple, il suit les pérégrinations des personnages, il caricature certaines situations, mais il réussit aussi à nous faire partager la quête de Manu, une quête qui le conduit à se poser des questions sur lui, sur sa manière d’appréhender l’amour, même et surtout celui que l’on dit charnel, sur sa place, aussi, dans le vacarme du monde. C’est de silence qu’il a besoin, en quelque sorte, pour se retrouver, ou se trouver, et ce silence, c’est dans la foi qu’il le trouve… ou croit pouvoir le trouver, en tout cas !

Pour mettre en scène ce scénario assez limpide et qui ne se prend jamais au sérieux, il fallait un dessin qui lui ressemble : épuré, parfois simpliste, parfois d’une certaine maladresse, pauvre le plus souvent en décors, mais riche en mouvements et en expressions, le graphisme de Max De Radiguès est exactement ce qu’il fallait pour que cet album ne ressemble pas à cette masse de livres d’artistes  » bobos  » qui ne font, en définitive, que se regarder le nombril.

Max De Radiguès: scénario et graphisme

Vincent Cuvellier: la foi

Cette  » Cire moderne  » est une tranche de vie. Une tranche de plusieurs vies, en fait, de trois vies qui, de confondues qu’elles sont au début, se révèlent, grâce aux talents mêlés des deux auteurs, très différentes les unes des autres. Et ce n’est pas là la moindre des qualités de ce livre, que de parvenir à dépasser la seule trame narrative pour nous faire, véritablement, et avec une vraie finesse de ton, avec une vraie tendresse également, le portrait de trois jeunes très symboliques, finalement, de ce qu’est la jeunesse : multiforme toujours !

Et cette tendresse est totalement flagrante en ce qui concerne l’hurluberlu du trio, le fameux Jordan, profondément irritant, mais tout aussi profondément attachant.

Vincent Cuvellier et Max Radiguès: ler personnage de Jordan

 

 » La Cire Moderne  » m’a fait penser, de par son ton, aux albums de Lauzier dans les années 70, mais avec un souci premier de simplicité et, surtout, de  » non-jugement « .

C’est, en tout cas, pour moi, une très bonne surprise ! Une surprise aux nombreux clins d’œil graphiques, d’ailleurs, qui en rendent la lecture encore plus amusante et amusée !

 

Jacques Schraûwen

La Cire Moderne (Dessin : Max De Radiguès – scénario : Vincent Cuvellier – éditeur : Casterman)

Art et cartes postales: prenez donc un peu de  » Chat  » pour bien commencer l’année !…

Art et cartes postales: prenez donc un peu de  » Chat  » pour bien commencer l’année !…

Si aucun miaulement dessiné ne s’est tapi sous votre sapin, voici venu le temps de retrouver Philippe Geluck et ses sourires félins pour quelques rires toujours bienvenus !

Bons Baisers du Chat (auteur : Philippe Geluck – éditeur : Casterman)

Les bons baisers du chat se conjuguent en 100 dessins… 100 cartes postales, en fait, délicatement rangées dans un coffret, et qu’il appartient au lecteur d’ouvrir pour pouvoir les lire, les admirer, les mélanger, les déclasser.

Philippe Geluck a créé, avec le Chat, un personnage singulier, une espèce de philosophe venu en ligne directe du Café du Commerce, mais d’un Café du Commerce où se côtoieraient uniquement des amoureux du non-sens et des militants anti-connerie affirmés.

On a l’habitude de voir le Chat s’étaler sans vergogne dans des albums à ranger dans sa bibliothèque. Cette fois-ci, il n’en est rien, et Philippe Geluck a décidé de faire preuve de nostalgie en laissant son personnage fétiche s’exprimer dans le cadre étroit de cartes postales… Une manière, en quelque sorte, pour le géniteur de ce chat, de nous adresser une centaine de courriers, et de nous pousser, aussi, à retrouver le plaisir d’écrire et de  » communiquer  » en utilisant les mots et leurs mille possibles !

Philippe Geluck: les cartes postales

Depuis pas mal de temps, on peut dire que le Chat fait partie de la grande famille des humoristes imperturbables. Faire rire, soit, mais avec sérieux…

Cela dit, il est vrai qu’au vu des nombreux (milliers de…) dessins commis par Geluck, force est de reconnaître que certains d’entre eux font rire, d’autres sourire, d’autres encore peuvent laisser indifférent.

Mais c’est là la force de ce fameux Chat, dont l’humour peut se révéler provocateur, ou littéraire, ou de situation… Chacun, finalement, y trouve, selon son humeur, selon le moment de la journée ou de la semaine, son content. Et cette présentation en cartes postales participe pleinement à cette caractéristique :  » Bons baisers du chat « , c’est un peu comme une mangeoire hivernale où les oiseaux que nous sommes peuvent picorer à leur aise, en suivant le seul fil du hasard, sans choix préalable…

Philippe Geluck: le rire

L’Art et le Chat (auteur : Philippe Geluck – éditeur : Casterman)

Après le catalogue d’une exposition qui a eu lieu à Paris et qui mettait en face à face Le Chat et quelques peintres reconnus, voici un album plus complet consacré à ce qui fut un événement : la confrontation entre l’Art, avec un A majuscule, et celui qu’on dit neuvième.

Philippe Geluck s’est incontestablement amusé, dans ce livre, à plonger son personnage dans les méandres de la création d’artistes mondialement connus. De Vinci à Munch, de Mondrian à Pollock, Le Chat s’en donne à cœur joie, tout en laissant la place, également, et heureusement, aux œuvres originelles, et à un résumé succinct de leur histoire. Ce qui fait de cet ouvrage un livre à la fois humoristique et didactique…

Philippe Geluck: le Chat et les grands peintres

Sans passé, pas de présent… Sans culture, pas d’avenir… Et toutes les cultures ne survivent, finalement, que grâce à l’art qui en est né, et qui continue à éclairer plus que les mémoires de temps révolus.

L’art, ainsi, est un chemin, entre hier et aujourd’hui, certes, mais aussi et surtout entre les êtres humains. Sans art, pas d’humanisme, sans humanisme, pas d’humanité.

En cette époque où la barbarie, au sens premier du terme, tente de détruire toute trace de qui fit la richesse culturelle, intellectuelle, artistique, d’un passé, quel qu’il soit, un livre comme celui-ci a l’immense mérite d’exister. Sans violence, avec humour, et d’une manière décalée, Philippe Geluck, simplement, nous y rappelle que l’art est aussi un des ultimes moyens qui existent pour combattre la médiocrité !

Philippe Geluck: l’art

Un coffret, un livre… Et des tas et des tas de plaisirs en perspectives… Plongez-vous dans les aventures tumultueuses et immobiles du Chat, pour que cette année naissante puisse encore et encore s’offrir des sourires, tellement essentiels pour vivre debout !

 

Jacques Schraûwen