Paris 2119

Paris 2119

Que sera notre futur immédiat ?

Une « anticipation » qui ne peut que faire réfléchir, et faire froid dans le dos! Signé ZEP pour le scénario et BERTAIL pour le dessin, voici un livre qui vient à son heure…

Paris 2119 © Rue de Sèvres

Notre planète se meurt lentement de trop de pollution, de trop d’indifférence. Le monde politique, depuis cinquante ans, n’a plus que l’illusion du pouvoir, lui qui a laissé l’économie et le libéralisme fou tout diriger, du nord au sud, de l’est à l’ouest. Les jeunes défilent dans les rues des villes belges et demandent, d’une manière peut-être trop « ludique », certes, mais bien réelle, que quelqu’un agisse.

Et il est normal que, face à cet avenir dont le moins que l’on puisse dire est qu’il est incertain, les artistes réagissent, eux aussi. Littérature, cinéma, peinture, bande dessinée s’ouvrent de plus en plus à cette peur qui s’installe dans notre univers (surtout occidental, il faut bien le reconnaître… Le dire…). Zep, dans son livre précédent, « The End », abordait déjà ce thème, en s’inspirant des découvertes faites au sujet des arbres et de leur possible communication. Dans ce livre, il nous montrait une nature qui décidait de se nettoyer de l’humain, grand parasite de la planète Terre…

Ici, il imagine une planète qui a trouvé la solution, grâce à la technologie. Les « pollutions » qui condamnaient la Terre sont pratiquement supprimées, grâce, entre autres, à la téléportation, voyage instantané sans aucun émanation de co2 ou de quoique ce soit d’autre.

Paris 2119 © Rue de Sèvres

Le problème, dans cet univers qu’il nous raconte, qu’il nous décrit, c’est qu’il a bien fallu que cette haute technologie salvatrice s’impose. Et que, pour ce faire, c’est une dictature universelle qui s’est installée.

De nos jours, déjà, ne sommes-nous pas toutes et tous fichés, suivis à la trace ?… Nos déplacements n’ont aucun secret, peuvent en tout cas ne pas en avoir, grâce à nos téléphones qui ne nous servent même plus à communiquer. L’homme de 2019 est déjà un objet… De surveillance, de consommation, de pouvoir !

Et donc, dans un siècle selon Zep et Bertail, notre planète est vivable, totalement, mais la liberté n’y est qu’un mirage auquel tout le monde croit. Tout le monde, ou presque… Parce que, tout comme aujourd’hui d’ailleurs, les grandes cités comme Paris ne cachent qu’à peine des chancres déshumanisés.

D’ailleurs, dans la description que nous font les auteurs d’un Paris devenu musée à ciel ouvert, surveillé par des vigiles, des drones, des hologrammes, on n’est pas loin du tout de ce que Schuiten nous montrait il y a quelques années dans « Revoir Paris ».

Paris 2119 © Rue de Sèvres

Dans cet univers, donc, tout le monde n’est pas dupe. Tristan, par exemple, qui continue à vivre « comme avant », aimant se balader dans les rues, aimant lire, de ces œuvres d’un siècle passé, d’un siècle ancien, d’une culture prête à disparaître. Il vit avec Kloé, une femme à la peau d’ébène et résolument plongée dans le modernisme.

Le premier ressort de l’anticipation, voire du fantastique, c’est de parvenir, insidieusement, dans un univers inventé ou recréé, à ouvrir une faille. Le quotidien, alors, s’y engouffre, lentement, et le récit peut s’enfouir dans de neuves réalités… même imaginées !

Ce ressort narratif, Zep l’utilise à merveille dans cet album. Et le récit devient vibrant et très contemporain au moment précis où le rétif Tristan découvre cette faille dans l’organisation technologique où l’humain est plongé.

Paris 2119 © Rue de Sèvres

Mais, en même temps, Zep garde sa vue très personnelle de ce qui nous attend. Et il remet, par petites touches, la nature et les arbres au sein même de son récit, comme des espèces d’ultimes barrières face à la normalisation du désespoir.

Et puis, comme toujours chez Zep, il y a dans son scénario autre chose qu’une vision sombre de qui nous sommes, il y a toujours la nécessité d’une possible espérance.

Et l’histoire d’amour qui unit Tristan et Kloé sera cette possibilité, infime mais vraie, d’une renaissance, d’une résistance.

L’amour, oui… Et la mémoire, surtout, elle qui ne meurt jamais totalement, elle qui, en osant regarder vers hier, peut empêcher l’aujourd’hui de n’être qu’un miroir déformant de nos rêves et de nos attentes.

paris 2119 © Rue de Sèvres

Il y a donc le scénario de Zep.

Le dessin de Dominique Bertail ne le trahit d’aucune manière, il s’inspire, c’est une évidence, du style de Zep, mais en créant des espaces graphiques moins portés à la seule esthétique et osant des décors aux imaginaires puissants.

La couleur, quant à elle, participe pleinement à l’ambiance de ce récit. Elle se conjugue très fort dans les tons de gris, de bleu, de vert, comme pour mieux symboliser l’univers contraignant qui est raconté. La couleur joue aussi avec les oppositions, le noir et le blanc, un peu de soleil, un peu de pluie…

Au total, même si, du côté du dessin, quelques influences sont parfois un peu trop évidentes, ce livre est extrêmement bien construit. Zep et Bertail utilisent à la perfection les codes de l’anticipation, chers autrefois à des gens comme le méconnu Andrevon ou le génial Sternberg, et l’album qu’ils nous offrent

aujourd’hui est poseur de questions auxquelles notre société devra bien répondre sans détruire ni l’humanité ni l’humain !

Jacques Schraûwen

Paris 2119 (dessin : Dominique Bertail – scénario et story-board : Zep – couleurs : Gaétan Georges et Dominique Bertail – éditeur : Rue De Sèvres)

Paris 2119 © Rue de Sèvres

Le Prof en 100 Tweets : la vie dessinée d’un enseignant heureux mais lucide !

Un prof vous parle… En quelques mots choisis, en quelques dessins aussi ! Et c’est à la fois réjouissant et tristounet. Comme la vie, la nôtre, celle des élèves, celles des enseignants !

 

 

Être  » prof « , ce n’est pas une sinécure ! Être prof, c’est avoir des tas de congés ! Être prof, c’est être en proie à l’angoisse ! Être prof, c’est le plus beau métier du monde ! Être prof, c’est avoir prise sur le monde réel ! Être prof, c’est subir les errances du monde moderne ! Être prof, c’est être obligé de se ressourcer sans cesse !

Voilà quelques-uns des clichés qui courent, de réseau social en discussion de bistrot, sur le monde enseignant. Et on pourrait en rajouter bien d’autres encore !

Dans la réalité, être prof, c’est se trouver, chaque jour de boulot, en face de quelques jeunes qui, eux, sont là pour trente-six raisons différentes : par véritable intérêt, par obligation, par paresse, etc.

Pour parler de cet univers, Fabrice Erre a choisi le chemin le plus direct, le plus apte aussi à s’enfouir véritablement dans l’univers des adolescents confrontés au monde de l’éducation : le strip, rapide, et le texte, tout aussi rapide !

Et puis, surtout, il a choisi le chemin de l’humour ! Un humour bon enfant, un humour  » dessin de presse « , avec des réflexions frontales, mais sans jamais éviter les vrais problèmes qui sont ceux de la fatigue, de l‘angoisse, d’un quotidien aux stress innombrables.

 

Ce qu’on découvre, en fait, dans ce petit livre, c’est également l’envers du décor. L’au-delà du simple rapport (de force ?) qui existe au sein d’une classe… Ce qu’on découvre, avec le sourire, c’est le côté potache, aussi, des profs entre eux, des profs quand ils ne se trouvent plus  » en représentation  » devant leurs élèves.

Grâce à son dessin dynamique, à son graphisme qui démesure les expressions jusqu’à les caricaturer, grâce à ses  » tweets  » simples et directs, Fabrice Erre restitue toute une série de vérités concernant son propre métier, celui de prof. Il parle de plaisir, certes, de déception, d’énergie sans cesse recommencée, de fatigue, aussi… La sienne, celle de ses élèves sans doute !

Et puis, sans avoir l’air d’y toucher, Fabrice Erre avoue que le drame, peut-être, de son métier, c’est de créer des relations humaines pendant des mois, et de savoir qu’elles ne peuvent, par définition, qu’être éphémères… Sans cesse à recommencer, de zéro… A chaque rentrée scolaire…

 

 

 

 

Un petit livre souriant, sans d’autre ambition que de passer un bon moment… Voilà ce qu’est ce « Prof en 100 tweets », qui intéressera les enseignants, qui y verront comme un miroir, les élèves, qui comprendront qu’ils ne sont pas seuls à trouver le temps long en classe, et tout un chacun qui y découvrira quelques vérités sur ce métier essentiel à toute démocratie, à tout humanisme aussi !

Jacques Schraûwen

Le Prof en 100 Tweets (auteur : Fabrice Erre – éditeur : éditions i)

Petite Encyclopédie Scientifique

Une collection de petits livres didactiques, bien construits, bien scénarisés, et prêts à être lus par tout un chacun, à partir de 7-8 ans… Il n’est jamais trop tôt pour découvrir ces portraits de quelques-uns des scientifiques qui ont marqué l’histoire de l’humanité !

 

Darwin © Editions Paquet

Darwin

C’est au milieu du dix-neuvième siècle que Charles Darwin a révolutionné le regard que le monde posait sur l’évolution des espèces, vivantes au sens le plus large du terme.
Dans ce petit livre, on raconte, simplement, avec des dessins sans fioritures, sans détails de décor, avec un texte sans envolées lyriques, tout ce qui, dès l’enfance, a motivé Darwin, en a fait un scientifique aujourd’hui mondialement connu. Un scientifique qui s’est certes inspiré des recherches précédentes mais qui, surtout, s’est voulu observateur minutieux de la nature pour arriver à des conclusions dépassant le « particulier » pour découvrir le « général »…
Darwin, un personnage attachant, bien racontant, sans lourdeur, en une bd qui se complète par un petit dossier qu’on doit à Lionel Cavin, scientifique Suisse.

Darwin © Editions Paquet

Newton

Isaac Newton… Un nom que tout le monde connaît, que tout le monde rattache immédiatement à l’image d’une pomme tombant d’un arbre, image qui fut chère à Gotlib entre autres…
Mais que sait-on de la vie de cet homme qui, en son temps, fut à la fois en butte à des attaques scientifiques virulentes et à des honneurs superlatifs…
Eh bien, dans ce petit album, vous découvrirez, avec vos enfants, que Newton ne fut pas seulement l’homme de la « gravitation universelle ». Ses recherches sur la lumière, sur les mathématiques, la chimie, le mouvement, ont marqué son époque et continuent à marquer le temps présent de la science.
Chevalier, Président de la société Royale, Maître de la monnaie anglaise, Isaac Newton, que l’on apprend à connaître dans cet ouvrage, est un des grands hommes du dix-septième siècle.
Et le dossier en fin d’album et dû à Ruth Durrer, professeure de physique théorique.

 

Newton © Editions Paquet

Marie Curie

Encore un nom qu’on connaît, et qu’on rattache à la fois au nucléaire et à l’histoire des prix Nobel.
Mais c’était aussi un personnage hors du commun, qui a voué son existence à l’étude, découvrant le polonium, le radium, créant des ambulances de radiographie pendant la guerre 14-18 proches du front.
Dans ce petit livre, on suit son existence, ses efforts dès sa Pologne natale pour apprendre, encore et encore, et partager ses découvertes pour le bien commun… Bien sûr, ses recherches, comme celles d’Einstein, ont débouché sur des réalités très peu caritatives…
Mais il est intéressant de la découvrir ici telle qu’elle était, une scientifique, d’abord et avant tout, une femme, aussi, dont le combat pour la science, tout au long de son existence, était aussi, finalement, un combat pour la reconnaissance des femmes dans un monde d’hommes.
Et ce livre se termine également par un petit dossier, sous forme d’entretien avec Didier Ferrère, de l’université de Genève.

 

Marie Curie © Editions Paquet

 

Tous les livres de cette collection « encyclopédique » ont deux points communs. Le premier, c’est de permettre une approche simple mais pas simpliste du tout, des mystères de la science, celle d’hier et d’aujourd’hui. Ce sont des portraits, à taille humaine, qui parviennent à démythifier le mot « scientifique ».
Le second point commun est encore plus important, à mon humble avis, même s’il est sous-jacent. Il est d’insister, sans lourdeur, sur ce qui fait la richesse d’une société, d’une civilisation, d’un groupe humain, quel qu’il soit : le besoin, fondamental et essentiel, de s’éduquer, d’être curieux, d’apprendre, et de ne jamais se contenter de réponses toutes faites aux questions que, dès l’enfance, on se pose.

A ce titre, on peut vraiment parler d’une collection encyclopédique pour jeunes lecteurs, entre 7-8 et 12 ans dirais-je, et d’une collection aux buts qualitativement atteints !

Jacques Schraûwen
Petite Encyclopédie Scientifique (auteur : Jordi Bayarri – éditeur : Paquet/Chours)