» Ni L’Un ni l’Autre  » et  » Zigzag Les véhicules »

 » Ni L’Un ni l’Autre  » et  » Zigzag Les véhicules »

Deux livres pour enfants à trouver dans la hotte de Saint-Nicolas…

Ni l’un ni l’autre

(auteure : Anne Herbauts – éditeur : Casterman)
Ni l’un ni l’autre © Casterman

On peut mettre en exergue de ce petit livre cette phrase : « Mon père est drôle, ma mère est grande, et moi, je ne suis ni l’un ni l’autre, je suis moi. » Anne Herbauts, avec un texte simple, avec des dessins volontairement enfantins, nous parle du quotidien d’un enfant, de ses perceptions du monde qui l’entoure.

Tout ça a l’air sérieux, mais tranquillisez-vous, c’est un vrai livre à lire à ses enfants, à ses petits-enfants, un livre qui vient à son heure, aussi, dans un monde qui devient de plus en plus virtuel.

Et je vais citer Anne Herbauts qui, par mail, a accepté de dialoguer avec moi… Elle me dit : « Etre soi-même, je pense, restera car nous avons un corps qui vit, donc goûte, tente, se confronte, change, grandit, vieillit, se cogne, sent. Et ce corps n’est pas virtuel. Il faut apprendre, et ne pas croire sans analyser, réfléchir. L’homme est un animal qui pense, qui rit, qui pleure et qui sait d’où il vient. Il a inventé le temps. Il a inventé le virtuel. Oui, certainement, les livres, pour les enfants et pour les grands, sont de grands lieux (refuges) où apprendre à réfléchir. »

Anne Herbauts m’a également parlé de l’importance de la lecture. Et elle a été très poétique.

Elle m’a écrit : « Le livre est pour moi un objet magique. On y voyage, on déchiffre, on avance dans un temps parallèle, celui du récit, on y rencontre des questions qui resteront ouvertes, on y construit ses réponses, on y rêve, on s’y projette, on n’y est pas jugé, on pense, on réveille des souvenirs, des sensations. Dans les livres d’images, on lit un merveilleux langage qui se déploie entre le texte et l’image, qui racontent ensemble quelque chose que ni un texte seul ne raconte, ni une image seule ne dit. C’est une osmose. Rien de virtuel. Rien que du papier. Il y a là une très grande liberté. Avec ou sans masque, virtuel ou non, lisons, lisons. Le plaisir des livres, c’est la griserie d’apprendre… »

Ni l’un ni l’autre © Casterman

Zigzag Les Véhicules

(auteur : Makii – éditeur : Casterman)
Zigzag © Casterman

Voici un livre destiné à des enfants un peu plus âgés, une espèce de livre jeu d‘imagination. Il se déplie en accordéon et devient une sorte de plateau de quelque deux mètres, nous montrant au recto différents paysages de villes et de villages, remplis de véhicules de toutes sortes, et nous racontant, au verso, des tas de petites histoires concernant les véhicules… Des véhicules qui, à leur manière, permettent à l’enfant, en les découvrant, en découvrant leur nom et leur utilité, voire à les imaginer, à avoir une vue personnelle et ludique sur le monde qui l’entoure. Chaque morceau de cet accordéon éveille l’imagination, oui, et l’enfant qui s’y plonge devrait, très vite, se mettre à se raconter des histoires. Ou à en raconter à ses parents ou grands-parents !

Zigzag © Casterman

Deux livres pour jeune public, à lire avec leurs parents, ou leurs grands-parents, pour le plaisir, simplement… Et pour soutenir le monde de la culture, au sens large du terme, qui en a bien besoin…

Jacques Schraûwen

L’Arbre à Palabres

L’Arbre à Palabres

Remedium, fort de ses expériences humaines, de ses convictions, de ses engagements militants, nous offre toujours des livres qui, à partir du réel, nous emmènent vers des approches sociétales importantes, essentielles même.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

C’est encore le cas aujourd’hui, avec un livre qui s’éloigne de l’univers de la bande dessinée et s’adresse à un public jeune, à l’enfance de tout émerveillement et, donc, de toute réflexion. Un livre réalisé avec la collaboration d’Amnesty International.

Au centre d’un village africain trône un arbre autour duquel on parle, on se raconte, on écoute, on vit.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

L’intolérance est l’apanage de l’homme, et cet arbre à palabres, narrateur de ce livre, doit être détruit par des guerriers venus d’ailleurs. Il s’agit « d’empêcher les griots de parler, les enfants de jouer, les anciens d’enseigner, les plus jeunes de comprendre ».

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

Mais la vie et la nature sont plus forts que l’incommensurable bêtise de ceux qui, au nom d’une foi, d’une idéologie, pensent posséder la seule vérité. Et autour d’une nouvelle pousse, les palabres reprennent, et le temps de vivre vient après celui de mourir et de tuer…

Le propos est sérieux. Le traitement, lui, est d’une belle simplicité, graphique et littéraire.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

Remedium nous raconte son histoire, sans se presser, avec des phrases simples, avec des dessins immédiats, des perspectives courtes, des expressions aisément reconnaissables. Et, ce faisant, il prouve que les livres pour enfants, les livres à leur lire, à leur faire lire, peuvent (et doivent…) se nourrir de rêve et d’intelligence… donc, de poésie !

Jacques Schraûwen

Auteur : Remedium – éditeur : Des ronds dans l’O jeunesse

Classe de Lune

Classe de Lune

Il y a des classes de neige, des classes vertes… Pourquoi n’y aurait-il pas aussi de « classe de lune » ?… De petit voyage scolaire sur ce satellite où l’homme, pour l’instant, n’a fait que mettre quelques pieds ?… Rêvons…

Classe de lune © Pastel

L’Ecole des Loisirs est sans doute la maison d’édition qui a le plus fait, depuis des années, pour casser la routine quelque peu désuète d’une littérature pour jeune public. Et cet éditeur continue, inlassablement, à nous offrir des œuvres littéraires et/ou graphiques extrêmement variées et qui ont l’immense avantage de pouvoir plaire autant aux parents qu’à leurs enfants !

Et c’est bien le cas avec cet album, d’une belle simplicité, du au talent de l’Américain John Hare. Pas un seul mot, mais des images en pleines pages, qui ne sont pas que des illustrations et qui s’apparentent vraiment à une bd muette au discours poétique accessible immédiatement.

Classe de lune © Pastel

Il s’agit donc d’une excursion scolaire. Toute une classe se rend sur la lune, s’y balade, écoutant et suivant leur professeur. Mais une petite fille reste en arrière et, éblouie par le spectacle d’un « clair de terre », elle s’arrête, prend son bloc de feuilles, ses crayons, et elle dessine cette planète qui est sienne et qui lui apparaît dans toute sa splendeur naturelle.

Mais voilà… Le reste de la classe n’a pas remarqué son absence (bien des professeurs et des animateurs se reconnaitront dans cette situation…) et remonte dans le vaisseau, prenant la direction de la Terre. Et cette petite fille, dans son scaphandre blanc, reste seule sur la Lune… Perdue, apeurée sans doute, mais sans angoisse particulière, malgré tout. Et elle se remet à dessiner… Un arc-en-ciel, une trouée de couleurs, comme pour affronter le sort.

Classe de lune © Pastel

Seule ?….

Pas vraiment… Des rochers se transforment, deviennent des formes humaines… La petite fille et ces formes vont ainsi devenir complices, dans le silence, d’un crime extraordinaire, celui du partage de la féérie artistique.

Les habitants de la lune se mettent à dessiner, eux aussi, sur eux-mêmes…

Mais voilà… Les meilleurs choses ont une fin, le vaisseau spatial revient, le professeur enguirlande son élève, l‘oblige à effacer ses « graffitis », ses « tags »…

Dans le vaisseau qui la ramène chez elle, cette enfant dessine ceux qui viennent d’être ses amis. Et sur la Lune, où elle a oublié ses feutres, la couleur devient un nouveau langage pour ces compagnons de quelques instants…

Classe de lune © Pastel

La poésie n’a pas toujours besoin de mots pour exprimer l’indicible… La poésie se trouve dans le regard qu’on pose sur elle… La poésie, ici, est celle d’une couleur somptueuse, d’une construction narrative à la simplicité superbe, d’un récit linéaire, mais qui parvient à la fois à ouvrir la porte au rêve à entrouvrir la fenêtre de l’âme à la magie de toutes les différences entre les êtres, ces différences qui les enrichissent lorsqu’ils acceptent d’ouvrir réellement les yeux et le cœur.

Une classe de lune, pour rêver et faire rêver… Un bien beau livre, pour les enfants en âge de maternelle, et pour leurs parents et leurs grands-parents… Un enchantement d’images !

Jacques Schraûwen

Classe de Lune (auteur : John Hare – éditeur : Pastel/L’Ecole des Loisirs/Rue de Sèvres – 48 pages – à savourer à partir de quatre ans et jusqu’à bien plus que 77 ans – parution : mai 2019)