Chiens De Prairie – une réédition bienvenue, une rencontre avec Philippe Foerster

Chiens De Prairie – une réédition bienvenue, une rencontre avec Philippe Foerster

Le « fantastique » a toujours fait partie intégrante de mes plaisirs de lecteur, depuis ma découverte, adolescent, de Jean Ray, de Gérard Prévot, de Marcel Béalu, de Claude Seignolle… Et, dans le cadre de la bande dessinée belgo-française, Philippe Foerster en est le héraut incontestable !

copyright anspach

Mais Philippe Foerster fut aussi scénariste, de temps à autre, en une époque lointaine où, avec Cossu, Andreas et Berthet, ils partageaient un atelier. Et la rencontre, ainsi, s’est faite, tout naturellement, entre l’imaginaire extrêmement large de Foerster et le graphisme au réalisme original de Berthet. Le résultat : un western dans lequel le fantastique, cher à Foerster, n’est pas présent !

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Ce western, paru initialement il y a une trentaine d’années si je ne m’abuse, joue avec les genres et les codes pour nous parler de Calamity Jane, de Hickok, d’un truand tueur se baladant avec le cercueil d’un ami, avec des chasseurs de prime, avec un gamin sourd-muet sans doute. Je le disais, tous les codes y sont : l’Histoire de l’Ouest américain en fond d’écran, avec Little Big Horn, par exemple, la violence gratuite, l’alcool, la mort, la légende et la réalité triviale…

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Mais les genres, eux, multiplient les références et les accents : il y a du gore, il y a des ambiances glauques et moites, il y a du western pur et dur, il y a de la grande Histoire, et même des envolées presque bibliques. Du Tarentino dessiné, en quelques sorte, avant Tarentino ! C’est, vous l’aurez compris, un excellent album que celui-ci, dans lequel la couleur occupe une place essentielle. Une réédition vraiment réussie, avec un dossier de Charles-Louis Detournay qui ne manque pas d’intérêt… Avec un scénariste d’un talent évident, que j’ai eu le plaisir de rencontrer…

Philippe Foerster

J’ai déjà parlé de Philippe Foerster dans mes chroniques, à l’occasion, entre autres, de la sortie d’un album paru chez mes amis Eliane et Cédric, de Forbidden zone, « Noir c’est Noir« .

J’ai déjà parlé avec lui de cette passion qu’il a du genre fantastique, de cette faculté qui est la sienne de créer l’horreur avec des sourires stridents, de mêler à l’innommable quelques étranges tendresses.

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Rencontrer Philippe Foerster, c’est toujours rencontrer quelqu’un qui a une vue de son métier qui manque parfois cruellement à certains auteurs mis en évidence par des médias quelconques. C’est toujours un moment de choix, comme perdu dans les méandres du temps…

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Et je n’ai pas résisté, bien évidemment, cette fois encore, à l’envie de le faire parler de ce fantastique à la belge qui est le sien, de l’écouter parler de ses influences, de Gotlib aussi…

Philippe Foerster

De nouvelles aventures dessinées par Foerster sont à venir, m’a-t-il dit. En attendant, se plonger ou se replonger dans ses livres, comme dans ceux de son complice Philippe Berthet, cela fait partie totalement du plaisir de lire, du plaisir d’aller à la rencontre d’univers extrêmement personnels et originaux…

copyright foerster

Et ces « Chiens De Prairie » qui unissent leurs deux talents, croyez-moi, en une réédition réussie, méritent véritablement le détour !

Jacques et Josiane Schraûwen

Chiens De Prairie (dessin : Philippe Berthet – scénario : Philippe Foerster – couleur : Dominique David – éditeur : Anspach – mai 2025 – 64 pages)

JEAN DUFAUX :

JEAN DUFAUX :

Portrait d’un scénariste au travers d’une conversation à bâtons rompus

La bande dessinée est un art étrange, dont la qualité ne peut naître que grâce à une alchimie étrange entre des mots, des dessins, des couleurs, des impressions et un récit. La complicité, dès lors, entre dessinateur et scénariste, est le premier gage d’une réussite.

Parmi les scénaristes actuels, il en est quelques-uns qui réussissent cette alchimie bien souvent… Yann, Zidrou, Zabus, par exemple. Et Jean Dufaux !

Son actualité plus ou moins récente est extrêmement variée : L’intégrale de « Double masque », dessiné par Martin Jamar, une adaptation de Giono, « Un roi sans divertissement », dessiné par Jacques Terpant (un livre que je vais bientôt chroniquer ici), un nouveau « Complainte des landes perdues » avec Teng au dessin…

Un Roi sans divertissement © Futuropolis

De série en série, de bal(l)ade dans la grande Histoire en création de personnages et de récits à taille humaine, Jean Dufaux aime mêler au réel des failles qu’on peut qualifier de « fantastiques ». Mais, toujours, ce qui le motive, ce sont des quotidiens qui, magiques peut-être, nous font rêver aux magies de nos propres vécus…

Complainte des Landes Perdues © Dargaud

Une rencontre avec Jean Dufaux, ailleurs qu’au profond de ses livres, c’est un moment de choix, c’est l’occasion de découvrir, loin des clichés, ce qui anime un créateur, ce que sont ses plaisirs d’écriture qu’il partage avec nous. Une rencontre avec Jean Dufaux, c’est l’occasion de deux ou trois questions, pas plus, pour l’écouter vous parler, en face à face, avec plaisir, avec réflexion, avec intelligence…

Voici donc cette conversation, autour d’une bonne table… Bonne écoute…

Double Masque © Dargaud

Jacques Schraûwen

« Un Roi Sans Divertissement » paru chez Futuropolis, « La Complainte des Landes Perdues » et « Double Masque » parus chez Dargaud

Le Dessableur

Le Dessableur

Le nouveau trimestriel du Centre Belge de la Bande Dessinée

Les mesures sanitaires qui sont celles que la société subit aujourd’hui sont cruelles dans bien des domaines. Dans celui de la culture, aussi, très largement. Et c’est pourtant maintenant qu’une nouvelle revue consacrée à la bande dessinée paraît.

Le Dessableur © CBBD

Le Dessableur, tel est le nom de ce nouveau magazine, un titre inspiré par l’implantation du CBBD, rue des Sables, à Bruxelles.

Il y a là, certainement, une manière de garder contact avec un public qui, de facto, est moins présent.

Mais il y a surtout une volonté, aussi, de dépasser la seule réalité des expositions, pour des analyses, historiques ou ponctuelles, plus fouillées.

Ainsi, ce premier numéro commence par un article consacré à « Super-Matou », un personnage créé pour le Pif Gadget des bonnes années par Jean-Claude Poirier. Une bd loufoque, proche de l’univers de Mordillo qui, à la même époque, officiait aussi dans Pif. Un article intéressant, bien documenté, bien illustré aussi.

Le Dessableur © CBBD

Le deuxième article est bien plus un article de fond, qui s’intéresse à la bande dessinée « muette », sans « bulles ». Il s’agit en quelque sorte d’une analyse historique de cette part tout compte fait importante de la bd, avec des noms importants : Benjamin Rabier, Caran d’Ache, mais aussi le graveur belge Masereel, ou, plus près de nous, des auteurs comme Breccia ou Quino.

Le Dessableur © CBBD

Vu l’ampleur du sujet, il y aura des déçus parmi les lecteurs, c’est évident. L’immensément méconnu Barbe, par exemple, n’a droit qu’à un entrefilet… Mais c’est la loi du genre, bien sûr, et le but (réussi) de cet article est aussi de nous montrer que la bande dessinée muette appartient totalement à la grande histoire du neuvième art, avec, de nos jours, des auteurs comme Midam ou Marc-Antoine Mathieu.

Isabelle Debekker

Il s’agit d’un premier numéro… Avec, donc, quelques points négatifs, surtout quant à la présentation, quant à un aspect trop « fanzine » des années 70, quant au choix des polices de caractère, quant à la lisibilité des pages.

Le Dessableur © CBBD

Mais les promesses sont là. Tout comme l’intérêt des articles présents dans ce premier numéro. Et gageons que le Centre Belge de la Bande Dessinée parviendra à pallier ces petits défauts pour nous donner l’envie de nous plonger dans le neuvième art tel qu’il fut, tel qu’il est, tel qu’il sera, le tout au sein d’une revue bilingue, français et flamand, dans une ville, Bruxelles, qui est encore toujours capitale pour les deux communautés belges, culturellement proches quand on parle de bande dessinée !

Jacques Schraûwen

Une revue disponible au CBBD, 20 rue des Sables, 1000 Bruxelles. Et par internet, en suivant ce lien. https://www.cbbd.be/fr/flash-info/le-dessableur-un-nouveau-magazine-pour-le-cbbd

Isabelle Debekker