A savourer sur la plage (ou ailleurs…)
Avec ce livre-ci, on se trouve dans une bande dessinée typiquement européenne. Une bd qui laisse la place à l’émotion, à la réflexion, à la poésie. A l’onirisme, aussi et surtout, puisque tout, ou presque, dans cet album, se déroule tout au long des flots d’un rêve presque surréaliste.
Un jeune homme, en voix off, raconte son rêve… Sa dérive, sur une barque, le long d’un fleuve aux eaux tantôt calmes et apaisantes, tantôt aux flots tumultueux. Dans ce petit rafiot qui tremble au rythme des frémissements de l’onde, il soigne et se lie d’amitié avec un oiseau, un oiseau à qui il parle, à qui il se livre.
Et il continue à se raconter, à se dire, à un personnage qu’on devine être sa grand-mère.
Rêve-t-il vraiment, ou ce songe qui l’emmène dans des lieux où rien ne lui est connu n’est-il pas le simple récit qu’il se fait de sa propre existence ?
Bien des thèmes sont abordés dans ce livre étonnant… La conscience, la perte d’un être cher, la déchirure d’une rupture, l’amitié et ses possibles, le don de soi, le langage, le miroir (celui de l’eau) où se retrouver.
Le rêve que vit, profondément, le personnage principal de ce livre est un voyage qu’il fait, et nous invite à faire, vers l’enfance, toutes les enfances, qui, finalement, se ressemblent par l’évidence des espérances qu’elles créent, des possibles qu’elle met en scène.
Ce » Presque jamais » est un poème graphique étonnant. Le texte ne cherche pas à éblouir, à aucun moment, et le dessin est joyeux, de bout en bout. Quant aux couleurs, ce sont elles, incontestablement, qui font toute la beauté et toute la richesse de cette histoire. Elles ont une force d’évocation exceptionnelle, par le rythme qu’elles imposent au récit, par le flou dont elle l’entoure, ici et là, par la lumière qu’elle réussit à recréer même dans les ombres de la tempête.
Un très bon livre au rythme lent, à savourer, doucement, lentement, sereinement…