La disparition d’un dessinateur qui fait partie intégrante de notre patrimoine culturel.
Je ne vais pas ici faire une longue chronique consacrée à Uderzo, qui vient de rejoindre Goscinny, Hergé, Jijé, Follet et tant d’autres dans des ailleurs qu’on ne connaît pas. Il était, et tout le monde le sait, un des deux créateurs de la série Astérix. D’autres que moi, nombreux, talentueux, vont vous parler, de réseau social en blog, de ce dessinateur au succès jamais démenti. Un succès commercial, bien évidemment. Mais un vrai succès artistique, aussi, du moins tant que René Goscinny assurait et assumait les scénarios des irréductibles petits Gaulois.
Albert Uderzo a atteint la gloire, certes, mais il lui fallut le temps avant de devenir un représentant majeur d’un neuvième art capable de s’adresser autant à un public de jeunes qu’à des lecteurs adultes.
Il y a eu dans les années 50 « Belloy », « Jehan Pistolet » avec déjà Goscinny comme scénariste, des albums avec Joly au scénario (« Marco Polo », « Tom et Nelly »). Et puis, à la fin des années 50, quelques épisodes de la série réaliste « Tanguy et Laverdure », et, surtout, l’époustouflant « Oumpah-pah ». Gamin, c’est avec cette petite série que j’ai compris le sens du double-sens, l’intelligence du jeu de mots. Goscinny et Uderzo, à mon humble avis, ont fait avec cette série humoristico-historique se déroulant entre France et Amérique bien plus qu’un simple brouillon de leur « Astérix le Gaulois » ! Une série à redécouvrir, croyez-moi !
Mais voilà, en art, c’est souvent le public qui choisit. Et quand ces deux complices ont créé ce petit Gaulois, personnage qui, sous couvert de comique de situation, se révélait être une caricature parfois féroce de la société française du début des années 60, ils ne s’attendaient pas au succès qui fut le leur ! Un succès dû sans doute à une envie (rare) d’auto-dérision de la part des Français, un succès dû aussi, surtout, à une écriture qui était résolument culturelle, avec utilisation du latin pour des gags qui, du coup, s’éloignaient des habituelles « tartes à la crème »…
Bien sûr, avec le temps, avec la mort de René Goscinny aussi, nul ne peut nier que la série « Astérix », aux ventes toujours pléthoriques, a énormément perdu de son souffle (j’avais envie de dire, de son «âme »). Mais ce personnage, à l’instar de Tintin, reste et restera cependant inscrit dans les gênes mêmes de la culture populaire du vingtième siècle !
Jacques Schraûwen