Une couverture sans faux-fuyant – BRAVO aux femmes en blanc !
Pas de chronique consacrée à un album, aujourd’hui…
Aujourd’hui, j’ai simplement envie de m’attarder sur une couverture de magazine ! Une couverture qui, au-delà de l’humour, ose faire réfléchir à notre aujourd’hui !
A la une du magazine Spirou, depuis bien longtemps, il y a la volonté de donner envie au lecteur d’ouvrir la revue et d’aller découvrir ce que cette couverture présente. C’est là une construction éditoriale tout-à-fait habituelle dans le monde de la presse, des médias. La couverture d’un magazine, c’est, en quelque sorte, la mise en avant de l’un ou l’autre sujet abordé dans les pages à tourner.
Or, ce 13 mai 2020, date de ce numéro 4283 du magazine Spirou, il en va autrement.
Bien sûr, « Les femmes en blanc », de Bercovici et Cauvin, sont une des séries phares de ce journal de bd. Bien sûr, en annonce, à la une, un nouvel épisode, c’est tout à fait normal. Sauf qu’ici, cette une ne correspond absolument pas à l’histoire des femmes en blanc qu’on trouve à l’intérieur de « Spirou ».
Il y a un titre, d’abord, directement inspiré par l’actualité : « Des applaudissements pour les Femmes en Blanc ». Il y a, ensuite, à l’arrière-plan, des infirmières surchargées de travail, ce qui est aussi d’actualité. Et, enfin, il y a, à l’avant-plan, une infirmière qui fixe le lecteur d’un regard fatigué… Et dont le geste peut prendre des significations très différentes. Se retrousse-t-elle les manches avant d’aller rejoindre ses collègues. Ou bien esquisse-t-elle ce qu’on appelle un bras d’honneur ?
Et si tel est le cas, à qui ce geste s’adresse-t-il ? A qui ou à quoi ?…
Loin de moi l’idée de choisir une de ces deux réponses ! Loin de moi également l’envie de dénigrer cette splendide couverture qui fait la nique à bien des organes de presse officiels, en osant, avec humour, dépasser les manifestations bien-pensantes orchestrées par un pouvoir politique qui, par ailleurs, édicte pour le futur des règles méprisantes à l’égard du personnel soignant !
« Les femmes en blanc », depuis plus de quarante albums, n’ont jamais hésité à montrer, de l’intérieur, les difficultés d’un monde médical de moins en moins respecté au fil des années.
Avec cette couverture à l’ambiguïté voulue, l’humour reste présent. Mais avec une touche sombre, cette fois, avec une envie, on le sent, de la part des auteurs, et donc de l’éditeur, de ne pas, ou plus, se contenter des discours tout faits de remerciements, de félicitations, d’héroïsme à la Deroulède. Et, ce faisant, d’oser s’intéresser avec un sourire crispé à une profession qui mérite bien plus que d’inutiles applaudissements devenus routiniers !
Jacques Schraûwen