Erotisme tranquille d’une héroïne qui, dessinée, se dénude…
André Taymans fait partie de ces auteurs discrets dont on est surpris de voir l’éclectisme et l’abondance des réalisations. Caroline Baldwin est, d’évidence, l’héroïne-phare de sa carrière, depuis 1996 et sa création dans le magazine « A Suivre ». Mais l’œuvre de Taymans dépasse largement le cadre de cette héroïne charmante et charmeuse.
Son trait, incontestablement « ligne claire », a ainsi fait merveille chez plusieurs éditeurs, et il serait fastidieux de faire l’inventaire complet de ses créations, de ses participations. J’épinglerai quand même Alex Nora, au début des années 90, un personnage plein de promesses mais qui, si je ne m’abuse, n’a vécu qu’une seule aventure. J’épinglerai aussi ses collaborations avec le romancier Delperdange (Assassine, entre autres…), quelques policiers classiques, aussi, comme Nero Wolfe…
Et le voici présent chez un éditeur qui ne manque ni de qualité ni d’ambition, Les « Editions du tiroir ». Avec Caroline Baldwin, oui, encore, avec cette héroïne qui, depuis presque vingt albums, vit des aventures échevelées. Détective privée atypique, américaine d’origine « peau-rouge », Caroline n’a jamais froid aux yeux, elle mène ses enquêtes jusqu’au bout… Des enquêtes classiques, le plus souvent, mais auxquelles André Taymans aime ajouter ici une touche d’exotisme, là un soupçon de fantastique, ailleurs une analyse discrète des dérives de la science, et un peu partout la critique souriante d’une société axée sur le seul profit.
Caroline Baldwin est une femme… A l’apparence peu recherchée, toujours, à contre-courant d’une iconographie qui aime montrer les héroïnes comme des « vamps ». Elle a, certes, parfois des attitudes dont on peut dire qu’elles sont sexy… On connaît d’elle, au fil de ses albums, un peu de sa vie privée, de ses vies privées. Mais ce n’est que furtivement qu’elle se révèle…
Ce n’est plus le cas, aujourd’hui, puisque ce personnage de papier a accepté de poser pour son créateur, dans le plus simple des appareils comme on dit !
Le trait est classique, les poses aussi. Toutes ont un point commun : les lèvres souveraines de cette jeune femme qu’on voit en action, au repos, se dénudant, s’exhibant. Sa bouche aux pulpeuses présences semble sans cesse être le point de gravité de ses attitudes, de ses expressions. Un autre point commun des dessins qui émaillent cet album, c’est le regard que Caroline pose, toujours, sur celui qui la dessine, et, au-delà de lui, sur les lecteurs, tous les lecteurs.
« Poses », c’est un livre érotique, mais à l’impudeur très délicate, très légère. Rien de graveleux, rien de provocateur… On a simplement l’impression de nous trouver, lecteurs, en face d’une femme libre qui accepte avec simplicité et naturel de nous montrer qui elle est, femme d’action mais aussi femme de chairs…
Un livre agréable, une ligne claire joliment mise à nu… Pour le plaisir des yeux, et pour l’envie, dès lors, de se replonger dans les aventures de cette détective sans beaucoup de tabous…
Jacques Schraûwen
Poses (auteur : André Taymans – Editions Du Tiroir – Février 2021 – 52 pages)