Entre 1975 et 2003, Christian Godard et Julio Ribera ont fait vivre à Axle Munschine des aventures improbables dans des univers qui empruntent à la science-fiction mille et un thèmes très actuels toujours.
Accompagné de Musky, sorte d’elfe moralisateur et omniprésent, Axle va ainsi connaître l’exclusion, la fuite, l’onirisme, la porte du sommeil, en se baladant de planète en planète
Pendant une trentaine d’albums, ces deux amis nous ont donc promenés, lecteurs assidus, dans des univers tous plus étranges les uns que les autres… Des univers dans lesquels les dessins de Julio Ribera s’en sont donné à cœur joie pour inventer des monstres de toutes sorte, des personnages imaginaires ressemblant à des cauchemars, des cauchemars ressemblant à des sourires…
Une trentaine d’albums, oui, mêlant avec infiniment de justesse les codes du fantastique à ceux de la SF, les codes du conte à ceux de la saga, les codes de l’horreur à ceux de l’humour.
Parce que Chistian Godard, ici scénariste, a toujours aimé créer des personnages hors du commun, de Martin Milan à Norbert et Kari, en passant par le héros de son roman policier « Pavane pour un catcheur défunt ». Avec le superbe « La Jungle en folie », « Tim et Anthime » également, et des dizaines d’autres aventures dessinées comme scénariste ou dessinateur…
Et j’ai décidé d’épingler cet album-ci, le sixième de la série, pour toute la folie dont il fait preuve en nous montrant notre monde, notre société manipulée par une imagination débridée, laissant à la virtualité l’occasion de pendre la place de la réalité, faisant de chaque rêve une vérité cauchemardesque… Le tout avec des dialogues ciselés, avec un dessin capable de décrire la folie en la rendant réaliste, avec une façon, surtout, de nous montrer nos quotidiens et ce qu’ils sont peut-être bien en train de devenir…
Christian Godard est un des grands magiciens du neuvième art, oublié par les tristes sires d’aujourd’hui qui ne jurent plus que par la mode ou l’argent…
Chez lui, aucune idéologie… Rien que le plaisir de l’invention, celui de la complicité avec son dessinateur, rien que le plaisir de ruer dans les brancards… Son Vagabond des Limbes faisait face, dans ces années pas tellement lointaines, à Valérian… Un Valérian qui, lui, appartenait pleinement à la science-fiction, et y faisait état par petites touches des convictions de son scénariste Christin. J’avoue que Valérian me tombait des mains, malgré la beauté de Laureline, mais que Axle Munschine, lui, m’enthousiasmait.
Si vous aimez la folie, si vous aimez l’onirisme, si vous aimez le quotidien s’ouvrant à l’horreur, si vous aimez les vrais auteurs de LA bande dessinée, (re)plongez-vous dans cette série étonnante… Laissez-vous dériver au feu des dérives de Godard et Ribera… Abandonnez ces pseudo chefs d’œuvre qu’on voir fleurir sur les étals des libraires branchés, et retrouvez une part de votre adolescence avec un non-héros passionnant !
Jacques et Josiane Schraûwen
Le Vagabond Des Limbes – 6. Quelle Réalité, Papa ? (dessin : Julio Ribera – scénario : Christian Godard – éditeurs : Vaisseau d’argent, Dargaud…)