Femmes – 40 Combattantes Pour L’Égalité

Femmes – 40 Combattantes Pour L’Égalité

« Bam ! » : une collection pour adolescents (mais pas seulement !!!!) de chez « Gallimard Jeunesse », des livres didactiques, instructifs, un regard humaniste sur notre monde, des petits ouvrages importants !

Femmes © Gallimard Jeunesse

Le féminisme n’est pas une émanation spontanée de ces dernières années, marquées entre autres par l’affaire Weinstein. Le féminisme, c’est la concrétisation essentielle d’idées égalitaires dans un monde qui ne l’est jamais vraiment. Le féminisme, c’est définir la différence comme une forme d’égalité supérieure, une égalité qui fait de l’humain un possible humaniste.

Le féminisme, c’est un combat qui a commencé il y a bien longtemps, un combat dont les héroïnes, le plus souvent, ne sont pas citées dans les livres d’histoire.

Le féminisme, ce n’est pas la recherche d’une domination, d’un changement de centre de gravité d’une société, que du contraire, mais la volonté d’un droit élémentaire, celui de tout être humain à avoir droits à des droits, tout simplement !

A ce titre, ce livre arrive à son heure, certes, mais il est là aussi pour rappeler que rien, jamais, n’est acquis, lorsqu’il s’agit de liberté, la liberté individuelle, la liberté sociale, la liberté politique.


Femmes © Gallimard Jeunesse

Ce petit livre, écrit dans un langage clair, et s’adressant VRAIMENT à tous les publics, dresse le portrait d’une quarantaine de femmes qui, depuis le dix-septième siècle, ont marqué leur époque par leur présence féminine dans un univers d’hommes. Et tous les domaines de l’existence sont abordés, grâce à cette galerie de personnages qui ont vécu pour l’art, pour l’enseignement, pour le journalisme, pour la puissance des droits de l’homme, pour la littérature, pour la liberté de l’âme et du corps.

Comment ne pas admirer la force, par exemple, de la peintre Gentileschi, qui a à la fois réussi à être une femme dans une corporation qui les refusait, et à faire condamner son violeur par la justice italienne du 17ème siècle ?

Comment ne pas admirer le travail de Flora Tristan, journaliste qui, en pleine révolution industrielle du dix-neuvième siècle a eu le courage de décrire la réalité du monde ouvrier, hommes et femmes perdus dans la même dictature du patronat ?

Comment, bien entendu, ne pas admirer Simone Veil, dont on sait tout ce qu’elle a réussi à changer, politiquement, dans la société qui est nôtre ?

Comment ne pas admirer Angela Davis, icône de la lutte pour les droits civiques des Afro-Américains, mais icône en même temps d’un combat tout aussi ardu, au sein même de son « groupe » révolutionnaire, le combat contre le sexisme le plus banal et le plus méprisable ?


Femmes © Gallimard Jeunesse

Ce n’est pas de la bande dessinée, à proprement parler.

Ce sont des textes succincts, qui réussissent, en petits tableaux, à écrire les grandes lignes de l’existence d’une femme, des textes illustrés, simplement, sans effets spéciaux, par des dessins qui ne cherchent qu’à compléter le « journalisme » du texte, en quelque sorte.

Sans avoir envie de tomber dans l’excès qui pourrait amener à une guerre des sexes bien plus qu’à une revendication légitime d’égalités de droits comme de devoirs, de liberté comme d’engagement, les auteurs de ce livre font un travail qui me semble salutaire. Celui, tout simplement, de faire de la mémoire collective et historique une arme efficace pour que s’humanise l’existence.

Ce livre est à mettre entre toutes les mains, il est à faire lire aux élèves, aux jeunes, eux qui de nos jours perdent tellement facilement le souvenir de ce qui leur a permis d’être ce qu’ils sont…

Jacques Schraûwen

Femmes – 40 Combattantes Pour L’Égalité (texte : Isabelle Motrot – dessin : Véronique Joffre – éditeur : Gallimard Jeunesse)


Femmes © Gallimard Jeunesse

Un Faux Livre 2

Le Meilleur De Un Faux Graphiste

Humour déjanté, détournements presque surréalistes de BD et d’illustrations « libres de droits »… Un petit livre pour sourire, sans faux-fuyant, mais avec plein de faux-semblants!

 

Un Faux Livre 2 © Delcourt

 

C’est une technique utilisée depuis bien longtemps, celle qui consiste à détourner des images existantes pour leur donner une tout autre signification, pour en décaler le sens. Les collages de Jacques Prévert, et les jeux, auparavant, des surréalistes, ont abondamment usé de ce moyen de « faire et défaire de l’art ».
Plus tard, le fameux magazine Hara Kiri a pratiqué cet amusement pour un humour qui oubliait la bienséance et choisissait avec une délectation quelque peu perverse la voie de la vulgarité et de la provocation.
Bien d’autres se sont lancés dans le plaisir d’ajouter des  » bulles  » à des dessins puisés ici et là, comme les artistes de Fluide Glacial, et, de temps à autre, le papa du Chat, Philippe Geluck.
Et avec ce  » Faux livre « , c’est dans ces univers-là que nous plongeons…

 

Un Faux Livre 2 © Delcourt

 

C’est un plongeon dans quelques vagues d’humour très particulier, reconnaissons-le, et reconnaissons qu’on ne rit pas à chaque page, loin s’en faut.
Mais, par contre, ce qu’on fait à chaque page de ce faux livre, c’est prendre plaisir à découvrir de vieilles illustrations, de vieilles bandes dessinées américaines aussi, avec des couleurs surannées, des traits trop marqués, des mouvements stéréotypés.
Et l’intérêt et l’intelligence de ce recueil de mauvais goût, c’est d’alterner des gravures extrêmement réussies avec des planches de bd particulièrement tristounettes.
Le mauvais goût, c’est aussi de l’humour, c’est une évidence. Et ici, comme dans une des pages de ce livre, c’est souvent de l’humour de beauf qui se dévoile. Et, ma foi, une fois de temps en temps, rire aussi de la grossièreté et de la vulgarité, ce n’est pas désagréable !

 

Un Faux Livre 2 © Delcourt

Partez à la découverte de Cyrano de Bergerac, pervers narcissique… D’un chasseur de chômeurs… De Billy the Kid affrontant Raspoutine… D’une jeune femme qui tombe amoureuse d’un vulgaire Playmobil… Du martyre de Saint Emilion… De l’utilité du trompe-l’œil en psychiatrie…
Rien ni personne, vous voyez, n’échappe aux envies perverses du  » faux graphiste « …
Et ce  » Faux Livre  » est à feuilleter, tranquillement, pour se laisser entraîner, au fil du hasard et des pages, vers des territoires de l’humour qui ne sont que rarement bien-pensants !…

Jacques Schraûwen
Un Faux Livre 2: Le Meilleur De Un Faux Graphiste (éditeur : Delcourt)

Un Faux Livre 2 © Delcourt

Falafel

Falafel

Un regard sur Israël… Celui d’un Israélien lucide… et dessinateur! Un livre sans manichéisme, mais, à sa manière, engagé…

Falafel © Dargaud

 

C’est au plus profond de ses souvenirs et de ses présents que Michel Kichka plonge, et nous plonge à sa suite, au profond de cet album.
Tout commence, dès les premiers dessins, en 1969, par sa découverte, physique, charnelle, d’un pays qu’il se choisit comme étant le sien, Israël.
Un pays loin de son enfance, vécue à Liège. Un pays dont les habitudes et la, ou plutôt les cultures prennent en compte des réalités qu’il n’a pu qu’imaginer et deviner en Belgique.
Et c’est, en effet, une autobiographie qui fait tout le contenu de ce livre. Une autobiographie qui emmène son auteur et ses lecteurs du sortir de la jeunesse à la maturité. Une autobiographie qui nous dévoile un être humain mais aussi un
Avec Kichka, le quotidien qu’il décrit, tous les quotidiens qu’il nous raconte, au fil des pages, donc des ans, tout cela n’est pas une finalité en soi, mais une manière de dresser le portrait d’une société changeante, et d’un être humain tout aussi évoluant.
Ce livre est fait de portraits, oui… Ceux des cultures qui, différentes, ont fait de Kichka à la fois un acteur et un observateur du pays qu’il a voulu sien.

 

Falafel © Dargaud

Michel Kichka: autobiographie

 

Michel Kichka: racines

 

Cela dit, même si Michel Kichka se définit comme citoyen israélien, on ne peut pas dire qu’il voue à l’aspect politique de son pays une admiration sans borne faite de soumission, et de silence !
Kichka est, à sa manière, un opposant aux régimes des faucons qui depuis pas mal d’années dirigent un complexe Israël. Un opposant, oui, qui raconte dans cet album ses combats, ses manifestations, ses rencontres parfois musclées avec le pouvoir. Un opposant qui ose parler des guerres de trop menées par Israël. Un opposant qui, de par sa présence sur le terrain qui sert de terreau à ses révoltes, peut avec justesse parler des déchirures de la société israélienne, DANS la société israélienne !
Michka est surtout un homme au regard ouvert et qui pratique l’humour, de page en page… L’humour que l’on dit juif et qui est d’abord et surtout une façon pour l’individu de ne pas se perdre dans la masse en réussissant à s’en démarquer par la dérision, voire l’auto-dérision. Michel Kichka, ainsi, joue avec les mots, nous parle de « sillonisme », pour mieux, peut-être, nous dire que la place de l’artiste, dans quelque société que ce soit, est de parvenir à rêver, et ce faisant, à faire rêver en traçant des sillons d’intelligence.

Falafel © Dargaud

Michel Kichka: critique

Michel Kichka: humour juif

 

Dessinateur, Michel Kichka est également passeur de témoin, puisqu’il donne cours. Et c’est aussi en tant que professeur qu’il peut montrer et prouver que tout dessin est universel, et qu’à chaque regard qui s’y pose peut s’attacher une compréhension différente. La scène qui illustre ce propos dans ce livre (une scène que je ne vous raconterai pas…) est sans doute un des moments les plus puissants de cet album !
Mais Michel Kichka, avant d’être auteur de bande dessinée et professeur de dessin, est dessinateur de presse. Un métier dans lequel se côtoient bien des personnalités différentes. Des affinités politiques et culturelles différentes aussi. Mais des artistes qui partagent un même langage, celui du refus d’un autoritarisme qui, reconnaissons-le, tend de nos jours à se démultiplier aux quatre horizons de nos mille et une sociétés.

 

Falafel © Dargaud

Michel Kichka: universalité du dessin

Michel Kichka: langage des dessinateurs de presse

 

Loin de moi l’idée, ici, de me faire le chantre d’Israël… Tout aussi loin de moi l’envie de faire preuve d’un quelconque manichéisme politiquement correct.
Ce qui m’a attiré, dans ce « Falafel », c’est la sauce piquante qui l’accompagne. C’est ce regard qui, certes amant, ne cherche jamais à inventer quelque excuse que ce soit à une réalité politico-économique aux infinies ambigüités.
C’est tout l’intérêt qu’il peut y avoir, pour nous, Européens, à aller au-delà de nos idées préconçues, et à accepter que quelqu’un nous parle « différemment » de son pays.
Ce qui me plaît dans ce livre, sans que je souscrive totalement à son propos, c’est ce qui sous-tend le travail de Kichka : une volonté, un besoin même, de rester proche de l’humain, sans arrêt, et, partant, de faire preuve sans cesse d’humanisme. En croyant à la Paix plutôt qu’en un Dieu, quel qu’il soit !

 

Falafel © Dargaud

 

Michel Kichka: humain-humanisme

 

Ce livre, dont le dessin est vif, souple, privilégiant ici le décor, là les trognes, ce livre dont la couleur accompagne les différentes séquences en leur donnant, presque, une tonalité proche, ce livre est amusant, didactique aussi, quand il nous montre les différences de gestuelles, par exemple, celles des manières de manger, de parler.
Il est instructif, oui, mais il est surtout intelligent, par le portrait qu’il nous fait d’un monde qu’on ne connaît que très partiellement, et surtout par le portrait d’un artiste qui sait la puissance des langages qui, finalement, sans cesse changeants, créent l’espérance en des mondes meilleurs…

 

Jacques Schraûwen
Falafel Sauce Piquante (auteur: Michel Kichka – éditeur: Dargaud)

Falafel © Dargaud