Le Royaume Des Fées – une plongée dans un univers toujours à réinventer, à re-raconter !

Le Royaume Des Fées – une plongée dans un univers toujours à réinventer, à re-raconter !

Une vieille légende ne dit-elle pas que, lorsque mourra la dernière fée, disparaîtra en même temps l’Humain ? Notre humanité, donc, dépend aussi de ce à quoi nous avons envie de croire, de rêver !

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Disons-le tout de suite, cet album n’est pas une bande dessinée. Et même si l’éditeur l’annonce comme destiné à la petite enfance, c’est un livre qui plaira aussi à bien des adultes !

Cela dit, donc, il s’agit ici d’un livre illustré, de grand format, aux couleurs attirantes, un livre dont l’ambition est de nous dresser le portrait de ces femmes qu’on trouve dans tous les contes, qu’ils soient pour enfants ou pour adultes, d’ailleurs, qu’ils soient « merveilleux » ou « fantastiques »…

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Les fées, dans ce livre de quelque 96 pages, sont décrites, racontées, dessinées, chacune d’entre elles se rattachant, de façon surnaturelle, à un des éléments qui forment à la fois la trame de notre planète et celle de nos « philosophies »… Le fantastique n’est -il pas, finalement, l’unique croyance qui nous rattache à nos racines, à nos enfances sans cesse recommencées ?

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La terre, l’eau, le feu, l’air sont ainsi mis à l’honneur au travers de différentes fées qui en peuplent les méandres. Par exemple, Esmeralda, fée de la terre, gardienne de toutes les espèces végétales, et qui aide les insectes à se trouver des cachettes enchantées… Il y a aussi la Fée de l’eau, Ondine, qui recueille les eaux des montagnes pour en faire ruisseaux, étangs et rivières… Dans l’univers du feu, Solange est reine et insuffle vie toutes choses. Enfin, dans l’élément de l’air, Liraz est la fée qui permet au royaume des fées de rester invisible pour les humains…

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Trois femmes sont aux commandes de ce livre très beau, graphiquement, trois femmes qui, peut-être, sont elles-mêmes des fées, pour un livre qui ne se contente pas de portraits, d’ailleurs, mais qui s’enfouit plus profondément encore dans ce royaume d’imaginaire et de possibles, grâce à, entre autres, un guide de la lune, à une carte fouillée des lieux où dénicher, avec de la chance, des fées…

C’est un livre ludique, oui… Un album pour petits et grands en fait, tant il est vrai que l’univers des jeux de rôles peut y trouver de quoi réinventer le jeu, donc la magie, donc la vie…

Jacques et Josiane Schraûwen

Le Royaume Des Fées (auteurs : Agnès Monod-Gayraud, Lorna White, Nadzeya Makeyeva – éditeur : Casterman – novembre 2024 – 96 pages)

Marée Haute – Nostalgie d’une enfance espagnole dans les années 90

Marée Haute – Nostalgie d’une enfance espagnole dans les années 90

Tout se passe en bord de mer, avec Isaac, un jeune garçon passionné de dessin et de bande dessinée…

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C’est, d’évidence, un album mélancolique, un livre qui nous parle de l’enfance, de ses rêves à accomplir, de ses quotidiens. Nous sommes près de Barcelone. Fleurissent sur la côte des établissements avec piscine pour éviter l’eau de mer bien trop polluée. Il y a des restaurants, bien évidemment, faisant de ces endroits des lieux attirant des touristes d’un jour qui viennent profiter d’un dépaysement à prix réduit, en quelque sorte.

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Dans le Baños Pleamar, tenu par son père et permettant à toute la famille de vivre, le jeune Isaac travaille, certes, mais, surtout, il observe. Sa famille… Les clients… Les jeunes filles qui passent et repassent, les amours éphémères, les engueulades tonitruantes… Il dessine, également, immortalisant ce qu’il voit au long de dessins naïfs mais aux promesses évidentes. Il vit son enfance, il profite sans réfléchir du temps qui passe et qui verra, bientôt, disparaître ces établissements et la vogue populaire qui était leur réalité.

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Ce livre, prenant axe autour d’une enfance vécue dans un de ces endroits, réussit à nous raconter l’évolution du tourisme, l’importance de la musique dans la culture de Barcelone (avec une playlist à découvrir), la nostalgie d’un âge irrémédiablement perdu, les sourires ensoleillés des corps sous le soleil et devant une paëlla. Ce livre, c’est la chronique d’un lieu au travers duquel chacun peut se reconnaître peu ou prou. Construite en chapitres, la narration permet à chaque chapitre d’voir une unité… Unité de temps… de rêve… D’onirisme, même… En mêlant, par exemple, des vraies photos d’époque et d’enfance aux dessins, donnant au récit la vraie puissance d’une autobiographie tranquille…

Jacques et Josiane Schraûwen

Marée Haute (aureur : Isaac Sanchez – éditeur : Dupuis – juin 2024)

La Revue Dessinée numéro 45

La Revue Dessinée numéro 45

La bd est multiforme, et les revues en sont parfois les messagers… C’est le cas avec « La Revue Dessinée », publiée par Casterman et qui en est donc à son 45ème numéro.

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 Il s’agit de ce qu’on peut appeler un magazine d’information en BD… Un magazine qui se veut indépendant, sans publicité… Un peu plus de 200 pages mélangeant reportages graphiques et petits dossiers didactiques… Le tout d’une manière généraliste, mais quand même fortement ancrée dans un univers franco-français.

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Dans ce numéro 45, bien des sujets sont abordés. L’euthanasie, par exemple, source de polémique chez nos voisins… J’aurais aimé, pour cet « article-là », que les auteurs dénoncent les mensonges éhontés qui ont été faits dans pratiquement tous les médias français au sujet de l’euthanasie en Belgique… Le sujet traité dans cette revue en aurait été, comment dire, moins « orienté »… Mais on parle aussi, dans cette revue dessinée, de sémantique, de cinéma, du scandale des ehpad, de fromage même, et on y raconte aussi l’histoire des trottoirs !

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Mais c’est d’un autre sujet abordé dans cette revue que je voudrais vous parler. Un sujet d’actualité, celui de la montée des eaux… Avec, comme focus, la Normandie… Avec, comme reporter-dessinateur, un Belge au talent incontestable, Jean Cremers. Intitulé « Quand la mer monte », petite référence à Jean-Claude Darnal, cette bande dessinée nous emmène sur quelques plages et dans quelques villes normandes, des lieux de plus en plus menacés par les effets du changement climatique. Avec un dessin clair, précis, extrêmement lumineux, Jean Cremers abandonne son plaisir à raconter des histoires pour faire un vrai reportage… Avec ce que cela crée comme contraintes, parfaitement assumées.

Jean Cremers

Un reportage qui met en évidence les différentes techniques que les municipalités utilisent pour se battre, à leur niveau, à leur manière, contre l’inexorable montée des eaux. Des techniques plus que des technologies, des efforts pas toujours couronnés de succès, du moins à moyen et long terme, et qui, souvent, oublient les « anciens » et de leur manière de comprendre leur terre…

Jean Cremers

Ce que ce reportage met aussi en évidence, c’est cette espèce d’isolement que la Normandie, du simple fait que la politique oublie ce qu’elle devrait être, et que les décisions qu’elle prend ne tiennent aucun compte, tellement souvent, de la réalité du terrain, donc des gens…

Jean Cremers

Jean Cremers, amoureux de la mer, ne cherche pas, ici, à étaler son talent, sa façon très personnelle de s’enfouir dans des scénarios mettant en évidence l’humain qui, comme le disait Baudelaire, devrait toujours chérir la mer… Il se fait, ici, le complice d’un reportage auquel, philosophiquement, politiquement aussi sans doute, il croit fermement… Et le résultat est une belle réussite…

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Jacques et Josiane Schraûwen

La Revue Dessinée numéro 45 – éditeur : Casterman