L’Arbre à Palabres

L’Arbre à Palabres

Remedium, fort de ses expériences humaines, de ses convictions, de ses engagements militants, nous offre toujours des livres qui, à partir du réel, nous emmènent vers des approches sociétales importantes, essentielles même.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

C’est encore le cas aujourd’hui, avec un livre qui s’éloigne de l’univers de la bande dessinée et s’adresse à un public jeune, à l’enfance de tout émerveillement et, donc, de toute réflexion. Un livre réalisé avec la collaboration d’Amnesty International.

Au centre d’un village africain trône un arbre autour duquel on parle, on se raconte, on écoute, on vit.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

L’intolérance est l’apanage de l’homme, et cet arbre à palabres, narrateur de ce livre, doit être détruit par des guerriers venus d’ailleurs. Il s’agit « d’empêcher les griots de parler, les enfants de jouer, les anciens d’enseigner, les plus jeunes de comprendre ».

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

Mais la vie et la nature sont plus forts que l’incommensurable bêtise de ceux qui, au nom d’une foi, d’une idéologie, pensent posséder la seule vérité. Et autour d’une nouvelle pousse, les palabres reprennent, et le temps de vivre vient après celui de mourir et de tuer…

Le propos est sérieux. Le traitement, lui, est d’une belle simplicité, graphique et littéraire.

L’Arbre à palabres © Des ronds dans l’eau

Remedium nous raconte son histoire, sans se presser, avec des phrases simples, avec des dessins immédiats, des perspectives courtes, des expressions aisément reconnaissables. Et, ce faisant, il prouve que les livres pour enfants, les livres à leur lire, à leur faire lire, peuvent (et doivent…) se nourrir de rêve et d’intelligence… donc, de poésie !

Jacques Schraûwen

Auteur : Remedium – éditeur : Des ronds dans l’O jeunesse

Classe de Lune

Classe de Lune

Il y a des classes de neige, des classes vertes… Pourquoi n’y aurait-il pas aussi de « classe de lune » ?… De petit voyage scolaire sur ce satellite où l’homme, pour l’instant, n’a fait que mettre quelques pieds ?… Rêvons…

Classe de lune © Pastel

L’Ecole des Loisirs est sans doute la maison d’édition qui a le plus fait, depuis des années, pour casser la routine quelque peu désuète d’une littérature pour jeune public. Et cet éditeur continue, inlassablement, à nous offrir des œuvres littéraires et/ou graphiques extrêmement variées et qui ont l’immense avantage de pouvoir plaire autant aux parents qu’à leurs enfants !

Et c’est bien le cas avec cet album, d’une belle simplicité, du au talent de l’Américain John Hare. Pas un seul mot, mais des images en pleines pages, qui ne sont pas que des illustrations et qui s’apparentent vraiment à une bd muette au discours poétique accessible immédiatement.

Classe de lune © Pastel

Il s’agit donc d’une excursion scolaire. Toute une classe se rend sur la lune, s’y balade, écoutant et suivant leur professeur. Mais une petite fille reste en arrière et, éblouie par le spectacle d’un « clair de terre », elle s’arrête, prend son bloc de feuilles, ses crayons, et elle dessine cette planète qui est sienne et qui lui apparaît dans toute sa splendeur naturelle.

Mais voilà… Le reste de la classe n’a pas remarqué son absence (bien des professeurs et des animateurs se reconnaitront dans cette situation…) et remonte dans le vaisseau, prenant la direction de la Terre. Et cette petite fille, dans son scaphandre blanc, reste seule sur la Lune… Perdue, apeurée sans doute, mais sans angoisse particulière, malgré tout. Et elle se remet à dessiner… Un arc-en-ciel, une trouée de couleurs, comme pour affronter le sort.

Classe de lune © Pastel

Seule ?….

Pas vraiment… Des rochers se transforment, deviennent des formes humaines… La petite fille et ces formes vont ainsi devenir complices, dans le silence, d’un crime extraordinaire, celui du partage de la féérie artistique.

Les habitants de la lune se mettent à dessiner, eux aussi, sur eux-mêmes…

Mais voilà… Les meilleurs choses ont une fin, le vaisseau spatial revient, le professeur enguirlande son élève, l‘oblige à effacer ses « graffitis », ses « tags »…

Dans le vaisseau qui la ramène chez elle, cette enfant dessine ceux qui viennent d’être ses amis. Et sur la Lune, où elle a oublié ses feutres, la couleur devient un nouveau langage pour ces compagnons de quelques instants…

Classe de lune © Pastel

La poésie n’a pas toujours besoin de mots pour exprimer l’indicible… La poésie se trouve dans le regard qu’on pose sur elle… La poésie, ici, est celle d’une couleur somptueuse, d’une construction narrative à la simplicité superbe, d’un récit linéaire, mais qui parvient à la fois à ouvrir la porte au rêve à entrouvrir la fenêtre de l’âme à la magie de toutes les différences entre les êtres, ces différences qui les enrichissent lorsqu’ils acceptent d’ouvrir réellement les yeux et le cœur.

Une classe de lune, pour rêver et faire rêver… Un bien beau livre, pour les enfants en âge de maternelle, et pour leurs parents et leurs grands-parents… Un enchantement d’images !

Jacques Schraûwen

Classe de Lune (auteur : John Hare – éditeur : Pastel/L’Ecole des Loisirs/Rue de Sèvres – 48 pages – à savourer à partir de quatre ans et jusqu’à bien plus que 77 ans – parution : mai 2019)

Le Livre des Qui Fait Quoi. Les Mots Peints.

Le Livre des Qui Fait Quoi. Les Mots Peints.

Pour les « Petits » : deux livres souriants, poétiques, intelligents…

Point n’est besoin de vous présenter « L’Ecole Des Loisirs », cette maison d’édition qui, au fil des années, s’est imposée comme une référence essentielle dans la littérature destinée à la jeunesse.

Et les deux livres présentés ici sont à regarder, à savourer par les tout petits… et leurs parents !

© L’Ecole des Loisirs

Le Livre des Qui Fait Quoi (auteur : Hervé Eparvier – illustrations de Soledad Bravi)

Qui fait le lait, qui fait le pain, qui fait le miel ?… Autant de questions nées du quotidien le plus banal et qui, souvent, n’appellent que des réponses plus ou moins évasives de la part des parents ainsi interrogés par leurs enfants.

Pour Hervé Eparvier, ces interrogations enfantines sont l’occasion, avec simplicité, d’ouvrir à la fois la mémoire, la curiosité et l’intelligence des enfants. En leur expliquant, avec des mots de tous les jours, ce qu’est le travail du paysan, ou du boulanger… Avec des mots simples, oui, immédiats, et qui ne manquent pas d’humour, par exemple pour répondre à la plus essentielle des questions : « qui fait les bobos aux genoux ?… »


Le Livre des Qui Fait Quoi © L’Ecole des Loisirs

Ce qui est simple aussi, au-delà du scénario qui nous montre une maman qui, à l’heure du coucher, répond aux questions de son fils, ce sont les illustrations. Avec un décor minimum, avec des couleurs qui remplissent totalement les pages de lumières accrochant le regard, avec des traits parfaitement délimités pour les visages et les attitudes, Soledad Bravi nous offre une sorte de « première bande dessinée », avec des cases en pleines pages… Nul doute qu’une telle construction d’un récit né du quotidien enchantera les enfants fiers et heureux d’être curieux !


Le Livre des Qui Fait Quoi © L’Ecole des Loisirs

Les Mots Peints (conception et texte d’Emmanuel Lecayer – illustrations de Marc Majewski)

Avec ce petit album-ci, on change d’univers. Facile de manipulation avec ses pages cartonnées, ce livre choisit la voie du rêve et de l’imaginaire.

Emmanuel Lecayer est de ceux pour qui le langage, donc les mots, est l’essence même du partage et de l’éveil à une existence qui se vit les yeux ouverts. Et parmi ces mots qu’on utilise souvent, trop souvent parfois, en oubliant ce qu’ils signifient, Emmanuel Lecayer en a choisi quelques-uns qui, de page en page, deviennent symboliques d’une sorte de philosophie de l’existence…

Réfléchir… Rencontrer… Oser… Voyager… Suivre… S’enfuir… Telles sont quelques-unes de réalités qui nous sont racontées dans cet ouvrage. Mais le plus important des mots qui émaillent cet adorable livre, c’est incontestablement « rêver » !

Les mots Peints © L’Ecole des Loisirs

Et face aux illustrations qui illuminent ce livre, comment ne pas rêver, comment ne pas laisser glisser son imagination dans des territoires toujours inconnus, toujours magiques ?

Marc Majewski, pour illustrer les mots choisis par son compère, a choisi le monde animal. Il y a des souris, une chenille. Ce qu’il y a, en fait, c’est un peu de ce que le regard de l’enfance peut intérioriser… Le monde animal a toujours été, depuis Esope, un chemin qui conduit en douceur à la réflexion humaine, donc humaniste. Ici, cela se fait en douceur… Mais aussi en beauté graphique évidente.

Chaque illustration, ainsi, raconte le début d’une histoire qu’il appartiendra à chaque enfant de compléter selon ses propres imaginaires…


Les mots Peints © L’Ecole des Loisirs

Deux petits livres à montrer à vos enfants, à vos petits-enfants, à lire et à feuilleter avec eux, surtout ! Parce qu’un livre restera toujours le plus efficace des chemins qui peuvent mener à la liberté… Celle de vivre, de partager, et de ne pas oublier l’enfant qu’on a un jour été !

Jacques Schraûwen