Bidouille et Violette – Une romance adolescente qui n’a attrapé aucune ride !

Bidouille et Violette – Une romance adolescente qui n’a attrapé aucune ride !

Nous avons toutes et tous des lectures qui nous ont marqués, qui restent ancrées à nos mémoires… J’en ai plusieurs… Parmi elles, cette bande dessinée que j’ai lue jeune et que j’ai fait découvrir à un ami, et à sa fille…

copyright van eeckhaut

Lire, c’est vivre un peu plus… Ce n’est pas s’échapper du quotidien, c’est réussir à le regarder autrement, en acceptant que d’autres regards puissent avoir autant de valeur que les nôtres.

Lire, c’est aussi se retrouver soi-même en des lignes qui, étrangement, nous décrivent et nous racontent mille fois mieux que ce que nous pourrions faire nous-mêmes.

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Ainsi, ce sont des livres de toutes sortes qui ponctuent nos âges et nous restent présents au fil des années.

Je ne vais pas m’amuser à tous les citer, de Léautaud à Baudelaire, de Vian à Alain-Fournier, de Gérard Prévot à Léo Malet.

Du côté de la bande dessinée, je l’ai déjà dit ici, j’ai été marqué, dès la prime enfance, par les Aventures de Thierry de Royaumont.

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A la fin des années 70, je me suis reconnu, terriblement, dans une série dessinée par Bernard Hislaire: Bidouille et Violette, une série poétique, souriante, intelligente qui était -et reste- l’image de la fin de l’adolescence et l’image de l’Amour.

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Hislaire, depuis, a changé légèrement de nom… Je me souviens qu’il m’a dit un jour que Bidouille et Violette était une œuvre de jeunesse… L’air de dire que c’était une histoire dépassée…

Il n’en est rien, loin s’en faut, et je le lui ai dit… En lui disant combien ce livre avait marqué ma jeunesse, et celle de bien d’autres garçons et filles, dont mon épouse.

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En voulant faire découvrir Bidouille et Violette à un ami, j’ai eu la preuve de ce que j’avançais il y a des années. Cette histoire d’amour improbable et poétique touche encore de nos jours, et pas seulement par nostalgie ! Cette preuve, je vous l’offre aujourd’hui, simplement, en mot nés de la plume d’une jeune fille, Aleksandra… Du haut de ses neuf ans, voici ce qu’elle en dit, tout simplement…

« Bidouille est un garçon grassouillet qui est amoureux d’une fille, Violette. Bidouille se demande ce que cette fille lui trouve, parce qu’il n’est quand même pas très beau, et qu’il est timide. Mais il fait des poésies incroyables que Violette adore ! Et Bidouille ne se concentre plus sur ses maths, mais plutôt sur ses écrits pour Violette.

Comment tout cela est-il arrivé ?

A l’école, dix garçons de 15-16 ans sont amoureux de Violette, et la retrouvent à la fin des cours, ce que Violette trouve vraiment fatigant. Bidouille, lui, la rencontre par hasard à la friterie de son père. Et c’est le coup de foudre !

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J’ai beaucoup aimé Bidouille et Violette, car j’aime bien les personnes timides, et j’aime tous les efforts que Bidouille fait pour se rapprocher de Violette. Rien ni personne ne les séparera, pas même leurs parents !

C’est une belle histoire d’amour, même si elle finit mal. J’aurais aimé qu’il y ait un cinquième tome. »

Il n’y a rien à ajouter à ces mots d’Aleksandra !

Il y a simplement à vous conseiller de lire et de faire lire cette série d’il y a quelque quarante ans et qui ne vieillit absolument pas !

Aleksandra Van Eeckhaut (avec Jacques et Josiane Schraûwen, amoureux, eux aussi, de Bidouille et Violette)

Bidouille et Violette (auteur : Bernard Hislaire – éditeur : Dupuis – Les premiers mots, les jours sombres, la reine des glaces, la ville de tous les jours, parutions de 1981 à 1986 – intégrale chez Glénat en 1996)

Bâtard – Réédition en couleurs d’un livre à redécouvrir!

Bâtard – Réédition en couleurs d’un livre à redécouvrir!

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Une cavale, une mère et son fils, des truands violents… Des apparences, surtout, qui ne correspondent que rarement à la vérité ! Un livre qui se lit d’une traite !

Sur les routes américaines, une femme et son jeune fils vivent de la fuite les peurs, les dangers, les actes insensés. Leur voiture, le coffre plein du butin d’un casse fabuleux, les emmène, inexorablement peut-être, vers une confrontation humaine qui ne pourra qu’être celle de la mort , de la violence, de la plongée en des néants inconnus.

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Mais voilà, comme dans tous les livres de Max de Radiguès, le récit ne conduit jamais là où tout semble le guider. Et au-delà de la linéarité de l’histoire, du sentiment de déjà lu qu’on peut avoir en en découvrant les premières pages, au-delà des références évidentes avec la littérature noire américaine et un certain cinéma dans lequel brillait Lee Marvin, dans lequel brille Tarentino aujourd’hui, ce livre s’amuse à mêler les codes du polar pour nous offrir, en définitive, une histoire humaine sans morale, certes, mais véritablement émouvante et intelligente, dans sa construction comme dans sa narration.

Comme toujours aussi chez Max de Radiguès, le dessin simple n’empêche nullement un propos qui dépasse, et de loin, la simple anecdote ! Son graphisme, sans aucun effet, a, c’est une évidence, un aspect parfois quelque peu  » enfantin « , avec des erreurs de proportions, de perspectives, avec une présence extrêmement limitée des décors. Mais tout cela participe du même but que l’écriture elle-même : l’efficacité dans la continuité du récit, l’efficacité dans l’approche, au plus près, des personnages, l’efficacité dans le rendu des émotions, essentiellement au travers des regards et de leurs échanges.

On pourrait croire se retrouver ici, avec Eugène, ce bâtard, accompagnant sa mère dans une sanglante cavale, dans un simple polar de série b. Mais tout le talent de Max de Radiguès, celui de son scénario comme de son dessin, c’est justement d’offrir à ses lecteurs une histoire qui, tout compte fait, s’intéresse réellement à des problèmes de société, cette société dans laquelle nous vivons et qui engendre de plus en plus de monstres à taille humaine !…

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J’aime beaucoup Max de Radiguès, parce que, d’album en album, il adore visiter et nous faire visiter des univers à chaque fois différents. J’aime son dessin immédiatement accessible, qui ne se perd jamais dans les méandres du  » beau « . J’aime ses histoires qui n’hésitent cependant jamais à donner vie à des réalités et des sentiments peu recommandables. J’aime aussi, énormément, son espèce de détachement, celui d’un spectateur plutôt que d’un acteur, un détachement qui ne fait, en définitive, qu’accentuer l’intérêt et la puissance de ses scénarios.

Un livre, donc, à lire, à savourer !

Jacques et Josiane Schraûwen

Bâtard (auteur : Max de Radiguès – éditeur : Casterman)

Bruissements d’ailes dans les méandres de la bande dessinée…

Bruissements d’ailes dans les méandres de la bande dessinée…

Dans une chanson de Jean-Claude Darnal, un gamin répondait au magicien qui lui demandait ce qu’il voulait : « Dites-moi m’sieur, faites que j’ sois un oiseau… »

L’oiseau, lien entre terre et ciel, entre chair et esprit… Omniprésent dans l’art et, singulièrement, dans la bande dessinée.

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C’est le cas dans des séries qu’on peut appeler animalières… Je pense à Chlorophylle de Macherot… A Canardo, aussi, de Sokal, personnage mythique du neuvième art, canard désabusé dans un monde tellement proche du nôtre… A une série récente, proche, scénaristiquement parlant, de Orwell, et intitulée « Le château des animaux », de Delep et Dorison, dont une des héroïnes est une poule résistant à la dictature.

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L’oiseau, dans le neuvième art, c’est également cette existence extérieure à laquelle accrocher ses rêves, comme le grand aigle de Yakari. L’oiseau peut se faire symbole d’une vie différente avec laquelle dialoguer, comme chez Schulz, avec l’amitié entre Snoopy et l’oiseau Woodstock. La différence de langage, d’existence, dans cette rencontre entre un chien et un oiseau, devient ainsi le vecteur de la tolérance.

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L’oiseau, cela peut être aussi le miroir des sentiments du personnage central (et de son auteur !). Voyez la mouette de Gaston, de l’inégalable et inégalé Franquin !

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Et puis, il y a l’oiseau comme fugace élément de décor. Je pense aux Tuniques Bleues de Lambil, albums dans lesquels, selon les propres dires du dessinateur, il se repose des uniformes et de la guerre en dessinant, ici et là, des petites scènes champêtres. C’est flagrant aussi chez Olivier Rameau, de Greg et Dany, une série poétique dans laquelle les objets et les animaux participent à la magie du récit. Et les mondes de Hausman sont pleins, eux, d’oiseaux porteurs d’imaginaire…

Dans les livres réalistes, il en va de même : Yslaire, Lepage, Chabouté, Pé, aiment les mouvements des oiseaux qui réussissent, par leur seule présence, à rythmer le dessin…

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dédicace

Mais les oiseaux de la bd peuvent aussi être porteurs de symbolismes plus adultes… Le corbeau du Teuf Teuf club, de Willy Vandersteen, me faisait, enfant frémir de peur… Chez Comès, dans L’ombre du corbeau, cet oiseau couleur de nuit se fait le témoin d’une guerre aux tueries impitoyables.

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Dans la série western Undertaker, de Meyer et Dorison, le compagnon de l’anti-héros, un croque-mort, c’est un vautour, tout simplement… Hommage, en passant, à Lucky Luke dont les albums nous montrent souvent, unis, croque-morts et vautours.

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Il y a également Les sept vies de l’Epervier, série historique de Juillard, et l’excellent Kraa de Sokal, albums dans lesquels l’humain et l’oiseau voient leurs existences se mêler intimement…

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Mais le maître dessinateur animalier de la bande dessinée, c’est sans doute Jean-Claude Servais… Et il est un de ses livres dans lesquels les oiseaux deviennent messagers de la tolérance, de la réflexion, d’une forme de philosophie : L’assassin qui parle aux oiseaux.

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Je ne peux pas ici oublier Jacques Tardi, qui a publié un petit livre de 25 pages muettes, 20 ans en mai 1871, un vrai chef d’œuvre de narration simple sans être simpliste… Un homme, à la fin de sa vie, va accomplir un geste qu’il s’était promis de faire. Et de chez lui jusqu’au Père Lachaise, il est accompagné par une jeune femme, la mort, et par un corbeau… Et symboliquement, ce corbeau observe une fin de vie, sans plus, comme un enfant qui, grâce à un magicien, a pu se transformer en oiseau….

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Et voilà, la boucle de cet article sans prétention est ainsi bouclée…

Jacques et Josiane Schraûwen