Les premiers soubresauts de la bande dessinée, tant au niveau du graphisme que du scénario, ont essentiellement choisi l’humour et la déraison… Robin Dubois est incontestablement à situer dans la lignée de cette réalité du neuvième art !
Loin de moi l’idée, ni l’envie d’ailleurs, de me lancer dans un pensum consacré à l’Histoire de la BD.
Mais ce que je trouve important, en une époque où bien des dessinateurs et des scénaristes, enfin reconnus comme artistes, se cherchent des alibis culturels pour tenter de faire oublier qu’ils sont auteurs de bd, je trouve essentiel, oui, de se souvenir que les « romans graphiques » souvent pompeux et pompants n’existeraient pas sans ce qui fut et reste de la bande dessinée populaire !
Et, sans aucun doute, le héros dessiné Robin Dubois fait partie intégrante de cet art populaire que j’aime, ici, mettre assez fréquemment en évidence.
Ses auteurs, le scénariste Bob de Groot et le dessinateur Turk, ont dû très certainement adorer Tex Avery, tant leur façon de construire des gags, visuellement, allie la folie, la déraison, la démesure… On se tape dessus, sans se faire trop mal évidemment, on aborde des sujets quotidiens pour mieux en ridiculiser les travers, le trait se fait caricatural pour exprimer des sentiments irréalistes, les grimaces des personnages aiment à accentuer la force d’un gag.
Ce personnage a vu le jour à la toute fin des années 60, et n’a arrêté de faire rire ses lecteurs qu’en 1998. Faire rire, oui… Vous savez, cette espèce de spontanéité physique dont on dit qu’elle est ce qui différencie l’homme de son environnement… Sans doute cette affirmation est-elle fausse, mais il n’empêche que le rire reste un moyen d’évasion facile et accessible à tout un chacun.
Et l’homme étant ce qu’il est, le chemin emprunté par Turk et de Groot correspond parfaitement aux routes de l’humour les plus ancrées dans l’âme humaine : le pastiche, la façon détournée d’aborder l’Histoire et d‘en ôter tout sérieux pour mieux la triturer et la rendre absurde, ce qu’elle est déjà le plus souvent naturellement !
Avant Léonard de Vinci, c’est donc Robin Des Bois que nos deux compères se sont amusés à égratigner…
Loin d’Errol Flynn, de Costner, de Richard Todd, de Sean Connery et même de Disney, le personnage mythique (et ne correspondant que de très loin à l’icône que le cinéma a faite de lui) du héros sans peur et sans reproche est ainsi devenu l’anti-héros de plusieurs centaines de gags déjantés, tout comme son compagnon le stupide shérif, son épouse acariâtre qui n’est pas sans rappeler une certaine cantatrice de la ligne claire, tout comme aussi ce prisonnier à l‘imposante barbe présent presque d’album en album.
Et donc, voici un best-of… Un choix de cent pages, de cent gags, tout simplement… Inégaux, bien évidemment, le contraire serait impossible, mais tous parfaitement représentatifs de l’humour décalé de ses auteurs, du côté absurde de cette série qui a fait les beaux jours du journal Tintin.
C’est un album hommage, en quelque sorte. A deux auteurs extrêmement prolifiques, bien sûr, mais aussi à cette bande dessinée aux résultats immédiats, cette bd populaire , c’est-à-dire proche des gens, proche des enfants comme de leurs parents, cette bd qui ne se prend pas au sérieux et qui, de ce fait, devient partie intégrante du plaisir de la lecture… Robin Dubois, ce fut aussi une série plébiscitée par ses lecteurs, grâce au référendum du journal Tintin qui mit par huit fois le tandem Turk-de Groot en première position !
Un livre sympathique, qui rappellera sans doute pas mal de souvenirs à bien des lecteurs, et qui ne demande qu’à se faire découvrir par de nouveaux fans !…
Jacques et Josiane Schraûwen
Best Of ROBIN – C’est Parti Mon Shérif ! (dessin : Turk – scénario : Bob de Groot – éditeur : Le Lombard – 112 pages – juin 2023)