SEPTEMBRE 2018 ET LA BD

Une fête, des prix, des nouveautés à ne pas rater…

On parle toujours beaucoup, en cette période de l’année, des romans de la rentrée… Mais il y a aussi la rentrée littéraire de la bande dessinée ! Et elle promet, cette année !

 

Et le mois qui arrive ne manque pas de livres et d’événements particulièrement attendus… Il va y avoir, par exemple, à Bruxelles, du 14 au 16 septembre, la fête de la bande dessinée… Des auteurs, des rencontres, des dédicaces… Et y sera remis, entre autres, le prix du roman graphique, décerné par la RTBF…
Ce sera aussi l’occasion de découvrir quelques albums pleins de promesses…
D’abord et avant tout, « Le chemisier », de l’hyperdoué de la bd, Bastien Vivès, chez Casterman – le portrait d’une jeune femme comme tout le monde, presque effacée, qui va découvrir sa sensualité et ses pouvoirs de séduction, au sens large du terme, grâce à un chemisier de soie… A signaler un second album de Vivès, qui va paraître chez Glénat : « Petit Paul », ensemble de petites chroniques quotidiennes d’un gamin qui se découvre en même temps qu’il découvre les difficultés de la vie et le bonheur du désir.

 

Et puis, chez Delcourt, « Une vie comme un été », de Yelin et Von Steinaecker – Une vieille femme en maison de retraite se souvient… Un parcours de vie dans lequel tout le monde pourra se reconnaître, avec un dessin lumineux et poétique…

 

Il y aura également le deuxième tome de la petite série « Le suaire », de Gérard Mordillat, Jérôme Prieur, et Eric Liberge, chez Futuropolis – Une fable fantastique, une histoire d’amour au-delà du temps, avec comme symbole le fameux suaire de Turin, réalité ou fantasme, relique ou arnaque…

 

 

Et, enfin, « L’âge d’or », de pedrosa et Moreil, chez Dupuis – Pedrosa, en bd, c’est un ovni… son dessin et son découpage n’ont rien à voir avec la tradition en gaufrier de la bd… Ici, c’est une histoire de Moyen-âge, d’heroic fantasy, de fantastique, de magie, qu’il nous offre, avec des dessins qui s’inspirent des enluminures anciennes.

 

 

Mais l’intérêt et la richesse de la bande dessinée résident aussi dans son éclectisme !
C’est pourquoi j’attends avec impatience de découvrir « Les rigoles », de Brecht Evens, chez actes sud… Un album qui semble n’avoir pas grand-chose à voir avec la bd traditionnelle, ni graphiquement, ni narrativement, mais dont le dessin et la couleur me paraissent étonnants, attirants donc…

 

 

Je pense également qu’il ne faut pas rater « Kivu », de Van Hamme et Simon, au Lombard –un dessin classique et inspiré, un scénario trop manichéen peut-être, mais un livre qui se lit avec plaisir, et un thème important.

 

 

Et enfin, il y a le tome 6 de la superbe série « Dent d’Ours », de Henriet et Yann, chez Dupuis – une saga sur fond de guerre, de nazisme, de choix humains et politiques, avec des personnages attachants, avec des intrigues qui n’ont strictement rien de manichéen et qui s’inscrivent dans l’humain de l’Histoire du vingtième siècle.

 

 

Ceci, vous l’aurez compris, n’est nullement une liste exhaustive… Mais j’espère que vous allez pouvoir y glaner quelques lectures qui vous étonneront, qui vous plairont…
Bonne rentrée BD, donc, à toutes et à tous !…

Jacques Schraûwen

Palombie Secrète : une édition exceptionnelle pour les trente ans du Marsupilami

Palombie Secrète : une édition exceptionnelle pour les trente ans du Marsupilami

Palombie secrète nous emmène à la découverte de la grande famille des Marsupilamis. Et ils sont nombreux, dans cette fratrie, et tous différents les uns des autres !

Cet album a déjà été chroniqué ici… avec une interview du dessinateur Batem. Une chronique à (re)découvrir si l’envie vous en vient.  Marsupilami : 30. Palombie Secrète
Mais si j’ai décidé d’en reparler aujourd’hui, c’est parce qu’un petit éditeur bruxellois, Forbidden Zone, a décidé de consacrer un tirage tout à fait remarquable de cet album.
Il y a un côté rédactionnel qui retrace l’histoire de ce personnage mythique créé par Franquin, bien entendu… Mais il y a aussi des interventions de Batem qui nous y raconte tout ce que ce personnage a eu comme importance dans sa vie d’auteur.
Et si l’album est au complet, évidemment, il l’est en un mélange subtil de crayonnés, de premiers encrages, de mises en couleur… Une façon de pénétrer pleinement dans l’œuvre créatrice de Batem, de ses scénaristes aussi.
Et puis, il y a des tas de documents inédits, des esquisses, des recherches, des mises en scène, des dessins destinés à créer les objets du merchandising…
Une vraie mine, donc, que cet album, pour les collectionneurs de bande dessinée !

Jacques Schraûwen
Palombie Secrète (auteurs : Franquin, Batem et Colman – éditeur : Forbidden Zone)

http://www.forbiddenzone.net

Fred Vargas reçoit le prestigieux prix littéraire Princesse des Asturies

Fred Vargas reçoit le prestigieux prix littéraire Princesse des Asturies

Considéré comme le « Nobel » du monde hispanophone, ce prix couronne cette année une auteure française de « polars », dont le jury souligne la portée universelle et l’apport à la revitalisation du roman policier.
Il couronne aussi une femme de lettres qui s’est aventurée quelque peu dans le monde du neuvième art.

Fred Vargas – © Baudouin/Vargas

Fred Vargas n’a rien de sectaire, loin s’en faut, et ses thèmes de prédilection sont d’abord ceux de l’humain. Bien sûr, il y a toujours dans ses écrits les codes du roman policier : des meurtres, une enquête, des fausses pistes… Mais il y a d’abord le plaisir qu’elle prend à nous montrer des personnages hauts en couleur, dont le portrait lui permet de s’aventurer dans différentes époques de la grande Histoire. Sa façon, par exemple, de nous parler de Robespierre dans un de ses récents romans, est absolument fantastique.
Aujourd’hui, c’est peut-être au travers des  » polars  » que la société dans laquelle nous vivons se dévoile le mieux, puisque ce sont les travers humains, les folies et les errances de tout un chacun qui servent toujours de trame à ces livres aux mille lucidités.
On peut, évidemment citer bien des noms d’auteurs qui, ces dernières années, ont permis d’universaliser ce genre littéraire qui, volontairement, puissamment, s’est toujours voulu proche de la réalité, quelle qu’en soit la démesure.
Et de démesure, il en a toujours été question dans les romans de Fred Vargas, cette femme de lettres issue du monde de l’archéologie. Démesure dans les intrigues qu’elle aime mettre en scène(s), démesure dans la variété des personnages qui sont devenus emblématiques de ses propres démesures littéraires, démesure, surtout, dans la construction extrêmement poétique de tous ses romans. Son personnage « fétiche », Adamsberg (dont on a fait une adaptation plus ou moins réussie en télé, donc plus ou moins ratée…) est l’antithèse du flic tel qu’on l’imagine. Il a, certes, la carrure de Maigret, mais c’est en rêvant, en dessinant, en cultivant le sens du langage, qu’il mène ses enquêtes. C’est un personnage hautement surréaliste, oui, sans aucun doute !…

Fred Vargas – © Baudouin

Et Fred Vargas a fait plus qu’une incursion dans l’univers de la bande dessinée, puisqu’elle a collaboré avec le dessinateur Baudouin, par deux fois si ma mémoire ne me trahit pas, et une troisième fois au cours d’une exposition qui s’est tenue à Bruxelles il y a quelques années.
Baudouin, que j’avais rencontré à cette époque, ne tarissait pas d’éloges sur la disponibilité totale de Fred Vargas, et Fred Vargas, elle, me disait avoir pris un vrai plaisir à voir se transformer ses mots en dessins d’une modernité puissante.
Le Prix qu’elle vient de recevoir couronne une œuvre, certes, mais aussi et surtout, peut-être, une femme ouverte à toutes les réalités de la création artistique, une femme à l’humanisme évident !

Jacques Schraûwen